Construction de crèche: une tradition qui résiste au temps grâce aux enfants
Lionel (en jeans), Salif (en vert) et Sayaouba admirant la crèche qu'ils ont construite

Construction de crèche: une tradition qui résiste au temps grâce aux enfants

Lionel a construit sa crèche avec l’aide de ses deux amis musulmans, Salif et Sayouba. Les trois adolescents ont ainsi conjugué leurs efforts pour faire briller la magie de Noël.  Si de plus en plus dans la capitale certains choisissent d’acheter des demeures préfabriquées pour le « Petit Jésus », d’autres par contre s’investissent pour perpétuer une tradition.

A 13 ans, Lionel Traoré a construit pour la première fois sa crèche.  « Je voyais les autres construire alors que moi je n’en avais pas », se rappelle le jeune adolescent en classe de 6e. C’est chez sa grand-mère à Kouritenga, un quartier de la capitale, qu’il décide de le faire, parce que dit-il, chez son père à Sonré, la cour familiale est petite et ne peut accueillir une crèche à sa devanture. Avec ses deux amis, tous musulmans, Lionel a donc travaillé pendant plusieurs jours pour que son vœu se concrétise. « Depuis qu’on est petit, on s’amusait, on jouait au ballon ensemble. Cette année quand il a décidé de construire sa crèche, il m’a dit de venir l’aider », explique Salif Koanda, également 13 ans en classe de 5e.

Pour les trois adolescents, il a fallu conjuguer la construction de la crèche avec les cours. « C’est seulement les mercredis soirs que j’ai cours. Le reste de la semaine, je n’ai pas cours les soirs. Donc ce sont les soirs que nous avons construit la crèche », explique Lionel. Salif précise pour sa part que c’est seulement le lundi soir qu’il a cours. « On vient souvent, quand il a cours le soir, on le laisse partir et nous-mêmes nous construisons », poursuit-il. Sayouba Ouédraogo, 6e, 13 ans aussi, a contribué à la construction de la crèche de son ami. « Mes parents savaient que je venais aider Lionel à construire sa crèche, mais ils n’ont rien dit », note l’adolescent.  Salif et Sayouba aussi auraient voulu avoir une crèche comme certains de leurs camarades. « Je suis musulman. Un jour j’ai essayé de construire, on m’a dit que ce n’est pas bon de construire devant la maison », dit timidement Salif.

Lionel Traoré aurait pu acheter une crèche comme le font certains enfants. Mais selon l’adolescent, le plaisir de s’investir personnellement dans la construction de la demeure du petit Jésus est plus grand. « Pour ceux qui ne savent pas comment construire, c’est bien d’acheter. Même si j’avais l’argent pour en acheter, je n’allais pas le faire. J’allais utiliser cet pour acheter de la peinture et des couleurs. C’est plus intéressant quand c’est toi-même qui fait », soutient-il.

Le Père Omer Sodéré, se réjouit qu’il y ait encore des jeunes qui perpétuent cette tradition instaurée par Saint François d’assise en Italie, il y a des lustres. Selon le religieux camilien, c’est encore mieux quand pour Noël qui est considérée comme la fête des enfants, ces derniers se donnent de la peine pour construire une crèche. « Il y a un neveu de 13 ans qui était en train de construire sa crèche devant sa maison. Les gens en passant et en regardant le gabarit de la maison trouvait que c’est une belle maison et se demandait pourquoi il n’achète pas. Il tenait à faire sa crèche comme il le fait chaque année », raconte le Père Omer Sodéré pour qui cette façon d’accueillir le petit Jésus en y mettant du cœur est une bonne démarche.

A quelques heures du réveillon, Lionel attend impatiemment que le nouveau-né pousse ses premiers cris dans sa crèche. « Je crois que Jésus va venir la nuit de Noel », laisse-t-il entendre plein d’espoir.