Tir à l’arc : la région du Sahel touche sa cible à la SNC 2024
Roukiéta Diallo s’apprêtant à tirer sa flèche, 2 Mai 2024, Bobo Dioulasso, © Studio Yafa

Tir à l’arc : la région du Sahel touche sa cible à la SNC 2024

Dans le contexte d’insécurité qui prévaut au Burkina Faso, où les voyages interrégionaux sont une entreprise risquée nécessitant des convois sécurisés, la participation de la région du Sahel à la Semaine Nationale de la Culture (SNC) 2024 à Bobo Dioulasso est un récit de détermination et de passion.

Situé à près de 700 km de Bobo Dioulasso, le Sahel est une région souvent isolée du reste du pays en raison de l’insécurité. Pourtant, cela n’a pas empêché une équipe de jeunes archers, dirigée par le dévoué coach Harouna Séoné, de faire le voyage pour représenter leur région dans la discipline peu connue du tir à l’arc.

Ce jeudi, c’est jour de compétition au tir à l’arc. Diallo Issoufou Hama, le jeune archer au regard déterminé, porte les espoirs de sa région, après un premier passage mal négocié. Son arc à la main, Diallo se tient prêt, concentré, alors que le public du Stade Wobi de Bobo Dioulasso, retient son souffle afin qu’il puisse se concentrer.

Les archers du Sahel au tir à l’arc à la SNC 2024 après les compétitions, 2 Mai 2024, © Studio Yafa.

Le coup réussi de Issoufou Hama

L’instant est solennel. D’un coup, la flèche s’envole et atteint la cible. Un murmure d’admiration parcourt la foule. Sept points. C’est le score qu’inscrit le jury sur la fiche de notation.  Diallo lève les yeux au ciel, un geste de gratitude, avant de les ramener sur son visage. Un moment de fierté et de bonheur pour toute l’équipe de la région du Sahel qui acclame son résultat inespéré.

La performance de Issoufou Hama, étudiant en anthropologie, n’est pas seulement une victoire personnelle. C’est aussi un symbole de fierté pour toute la région. « Déjà venir à Bobo Dioulasso pour dire qu’on a représenté le Sahel, c’est une fierté pour nous. Si on gagne le trophée, c’est un plus », s’exclame-t-il avec enthousiasme à la suite de son coup réussi.

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« Nos performances ne vont que grandissante. Cette discipline n’est pas développée là-bas. J’ai un peu forcé les gens à faire. C’est une manière d’essayer d’implanter cette discipline là-bas. Comme c’est la première fois qu’ils étaient là, ils sont venus, la leçon en en train de prendre », dit-il tout en rappelant qu’aux éliminatoires, Issoufou Hama s’est qualifié avec seulement une note de 4.

Issoufou Hama (droite et après avoir atteint la cible au tir à l’arc de la SNC 2024 à Bobo Dioulasso, 2 Mai 2024, © Studio Yafa

Diallo n’était pas seul. Roukiatou, Falida Diallo, Alcadry Hama, sont tous aussi passés pour braver les regards et les doutes. Malgré l’absence de point au tableau, ils sont tous d’abord fiers de n’avoir pas abandonné. Roukiatou a manqué son tir mais aspire à l’amélioration à la prochaine SNC, si elle réussit à se qualifier. « On vient de participer à la compétition. Le sentiment qu’on a, c’est la fierté d’être venus représenter notre région. On a vu comment les choses se passent. On espère faire mieux la prochaine fois », affirme-t-elle.

Un défi à relever

Le tir à l’arc, une discipline qui n’est pas traditionnellement pratiquée dans le Sahel, a été introduit comme un moyen d’implanter une nouvelle culture sportive. Harouna Séoné, le chef d’orchestre avec peu de ressources a réussi à former une équipe dont une jeune fille dans la catégorie pool jeunes. C’est leur première apparition sur une scène aussi prestigieuse. « La mayonnaise est en train de prendre », murmure-t-il, les yeux brillants d’espoir.

Farila Diallo en compétition à la SNC 2024 à Bobo Dioulasso, © Studio Yafa

Il a dû braver plusieurs étapes pour atteindre ce résultat, petit, peut-être pour les uns, mais gigantesque pour cette équipe venue du Sahel. « Cette discipline n’est pas développée dans la région du Sahel. J’ai un peu forcé les gens à la pratiquer. C’est une manière d’essayer d’implanter cette discipline là-bas. Comme c’est la première fois qu’ils étaient là, ils sont en train de tirer des leçons », ajoute-il encore.

Cette fierté et cet enthousiasme se justifient aussi par les difficultés bravées pour être là à Bobo Dioulasso. En effet, les archers du Sahel manquent presque de tout. Située dans une zone presqu’enclavée du fait de l’insécurité, l’équipe du Sahel a eu du mal à produire des arcs, les flèches et le carquois. « On avait seulement deux arcs. Et quand on a fini de les utiliser, c’était fini et on était là, on attendait qu’on soit livrés. Il fallait commander à Gaoua pour qu’on nous livre le matériel », explique Issoufou Hama.

En défendant les couleurs de leur région dans un contexte aussi difficile, ces jeunes archers du Sahel veulent aussi prouver que la culture et la détermination peuvent triompher sur l’insécurité.

Boukari Ouédraogo