Plaines rizicoles de Bagré : la moisson du désastre après les inondations

Plaines rizicoles de Bagré : la moisson du désastre après les inondations

Les prévisions heureuses de plusieurs riziculteurs de Bagré dans la région du Centre-Est ont viré au cauchemar. Les fortes pluies enregistrées les mois d’août et septembre ont précipité l’ouverture des vannes du barrage par la Société nationale d’électricité du Burkina (SONABEL). L’onde de choc a été ressentie par les riziculteurs, avec plus de 550 hectares de riz inondés. Un lourd silence de désolation et d’impuissance règne dans ces périmètres rizicoles dont certains sont exploités par des jeunes.

Salif Ouandaogo, 28 ans, ouvre le chemin qui mène à son bassin rizicole. Le terrain est boueux, difficile d’accès et le jeune prévient de faire attention. Malgré tout, notre guide chute dans la boue, les semelles des chaussures se détachent, il faut retrousser les pantalons pour continuer à patauger.

« Les fortes pluies ont déjoué tous nos pronostics. Quand on a ouvert les vannes du barrage, l’eau a tout emporté. Certains riziculteurs avaient repiqué le riz, d’autres non. Les dégâts sont énormes », explique le jeune riziculteur en montrant du doigt son champ de riz qui ne l’est encore que de nom. Une vaste étendue noircie et abandonné. Cette année, s’annonce particulièrement difficile pour lui. « On ne sait plus quoi faire. La seule option, c’est d’attendre la prochaine saison pour espérer nous rattraper. Même si on refait actuellement, ça ne réussira pas. C’est mieux de laisser et de reprendre après », poursuit celui qui a vu ses 2,5 hectares emportés par les eaux.

 

Des moments de silence et Salif Ouandaogo jette un regard inquisiteur autour de lui.  Avec un brin d’amertume, il évoque son investissement, ses heures de travail et ce qu’il espérait récolter. « Sur chaque hectare, on récoltait environ entre  4,5 et 5 tonnes à l’hectare. Ces deux jours, nous sommes dans la désolation, on n’a plus de travail, notre espoir, c’était les travaux champêtres», poursuit-il.

Salif Ouandaogo est membre de la coopérative Miitiri des jeunes producteurs de riz de Bagré. Dans ce regroupement 20 de producteurs, hommes et femmes, ont vu leurs champs inondés.

« Ça nous a vraiment impacté, parce que le calendrier est déjà faussé. Les gens avaient repiqué et puis l’eau est venue emporter. Actuellement si tu veux recommencer pour repiquer et mettre la fumure et autre, tu ne pourras pas t’en sortir(…) », explique Ousseini Ouelgo, président  de la coopérative des jeunes.  Il note par ailleurs que la fin de la campagne rizicole est normalement prévue entre novembre et décembre. « Mais si tu veux recommencer actuellement, c’est en janvier ou février. Pourtant, en décembre le climat n’est pas favorable à la production du riz », regrette le président.

 

Pour autant, les jeunes producteurs de riz n’en veulent pas à la Société nationale d’électricité du Burkina (SONABEL) pour avoir ouvert les vannes. Il le fallait, reconnaissent-ils, sans quoi la digue du barrage aurait cédé, à cause du trop-plein d’eau. « Il y  a souvent eu des désagréments, mais pas de cette ampleur. Cette année, c’était vraiment une mauvaise exception(…) c’est le travail  de Dieu, on n’a rien à dire », se contente le jeune producteur.

Le 7 septembre 2020, après une visite des lieux, le directeur général de Bagrépôle Victor Sawadogo a annoncé que 550 hectares de riz, exploités par 600 producteurs, ont été inondés. Les superficies inondées devraient générer  2700 tonnes ce qui représente plus 400 millions de  F CFA.