Médias :  »Les femmes aiment dénigrer les autres femmes qui parlent »
Nestorine Sangaré invite les médias à trouver une autre approche pour liberer la parole des femmes

Médias :  »Les femmes aiment dénigrer les autres femmes qui parlent »

Les femmes peinent toujours à libérer la parole dans les médias au Burkina. La question de la femme en tant que sujet de traitement médiatique a fait l’objet de Ya’débat cette semaine. Entre manque de confiance en soi et absence de thématiques liées à la femme, les invités de Ya’débat reconnaissent que ‘l’autre moitié du ciel s’expriment peu et manquent d’espaces dans les médias burkinabè.
 
 »Dans un journal parlé de 20 mn ce vendredi 6 mars 2020 sur Ouaga FM ce sont seulement deux femmes qui sont intervenues », fait observer Paul-Miki Romba, rédacteur en chef de cette chaine. Une édition particulière précise-t-il, parce que le fait n’est pas toujours évident sur les ondes de la radio. ‘’ Pourquoi les médias ne donnent la parole aux femmes ou ne traitent des sujets relatifs aux femmes que durant le mois de mars. Pourquoi ?’’, s’est d’abord s’offusqué Aïssata Sankara, journaliste indépendante.
 
Pour l’ex-rédactrice en chef d’une télévision privée à Ouagadougou les médias  contribuent  à travers ces clichés à davantage créer le fossé de l’inégalité. Pourtant réplique Paul-Miki Romba, les médias font énormément d’efforts pour donner la parole aux  femmes. ‘’ Ce ne sont pas les médias qui ont pris l’option de tendre le micro qu’aux hommes. Nous recommandons toujours aux journalistes de faire intervenir les femmes dans les reportages, mais ils reviennent à chaque fois sans contenus féminins’’ soutient le rédacteur en chef.

Ce n’est pas une surprise pour Nestorine Sangaré directrice du Criged de voir deux femmes intervenir dans un journal de 20 minutes. Les micros ne sont, à son avis tendus, qu’aux hommes. Un fait qui réconforte les femmes dans leur conviction: voir leur point de vue n’a pas la même valeur que celui de l’homme. ‘’ L’homme qui tient le micro pense d’ailleurs que la femme n’aura  rien de bon à dire. Et la femme aussi pense que ce qu’elle dira ne volera pas haut’’ déplore la spécialiste en genre. 
En clair, la parole des femmes est libérée mais  le mode d’expression diffère de celui des hommes. ‘’ Les femmes sont plus dans l’approche de confidence. Elles parlent plus en privé qu’en public ’’ explique Nestorine Sangaré.

Les femmes ne sont pas au cœur de l’actualité par manque de confiance

Paul Miki Romba reconnait que les femmes ne sont pas au cœur de l’actualité, sans doute dû à leur manque de confiance. ‘’ On négocie même les femmes. Et très souvent on leur donne la réponse pour les aider dans la suite de leurs interventions.  Tout cela pour montrer la volonté des médias à amener les femmes à parler’’ note le rédacteur en chef. Mais il faut justement de la manière dans l’approche et la mise en confiance pour aider les femmes à s’exprimer, indique l’ex-rédactrice, Aissata Sankara. Et ce ne sont pas les thématiques d’intérêts relatifs aux femmes qui manquent selon Nestorine Sangaré. Elle estime toutefois que socialement l’expression des femmes dans la sphère publique n’est pas admise mais plutôt dans la sphère privée. Les médias doivent donc aller vers elles dans cette sphère privée. 
Malheureusement déplore la spécialiste en genre, les femmes elles- mêmes n’aiment pas voir leurs semblables parler et mènent un travail de dénigrement entre elles. 
 
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