Le front social en ébullition

Le front social en ébullition

Le quinquennat de Roch Kaboré a été émaillé de grève dans tous les domaines. Education, santé, justice etc. Tous les secteurs ont été touchés au Burkina Faso bloquant ainsi  le fonctionnement de l’administration publique.

Inoussa Zida, est un enseignant recruté dans le cadre du Programme emploi-jeune pour l’Education nationale (PEJEN), une promesse de campagne du président Roch Kaboré pour résorber la problématique de l’emploi des jeunes. Depuis plusieurs mois, ils manifestent  avec ses camarades à la bourse du travail pour leur intégration dans la fonction public. Malgré une décision de justice qui ordonne leur intégration, Zida et ses camarades n’ont pas été établis dans leur droit. « Il était dit dans le contrat de base que le PEJEN est un dispositif  de pré recrutement de jeunes diplômés souhaitant enseigner avec possibilité à termes d’intégrer  la fonction publique à travers un mécanisme spécifique. Nous avons essayé de négocier avec l’autorité à tous les niveaux. Nous nous sommes rendus compte qu’il n’y a pas de gain de cause. Nous sommes dans un Etat de droit, nous avons décidé d’ester en justice. », déplore-t-il.

Ce mouvement d’humeur  des enseignants PEJEN s’ajoute à la longue liste de marche, meeting, sit-in, grève etc. qui ont marqué le quinquennat du président Roch Kaboré. Le système éducatif est l’un des secteurs les plus touchés par les mouvements de protestation. Harouna Sana, membre du bureau de la fédération des syndicats nationaux des travailleurs de l’éducation et de la recherche  F-Synter  témoigne : « Il y’a d’abord des points qui visent l’amélioration des conditions de vie et de travail notamment la question de carrière, la question des infrastructures scolaires, la question des effectifs pléthoriques. Egalement il y’avait la question de la cantine scolaire pour les élèves, le retour des bourses qu’on a supprimé depuis les années 1990, également question de la motivation des enseignants, tout ça couronné par la revendication d’un statut particulier.

Le secteur de la santé n’a pas été épargné non plus. Le Syndicat national des travailleurs de la santé humaine et animale (SYNTSHA) a observé une grève sans assurer le service minimum. Selon Bernard Sanon, membre de ce syndicat, le gouvernement les a vus comme des ennemis au lieu de partenaires sociaux. «Les luttes se sont menées autour d’une plateforme qui a été adoptée en décembre 2015. Nous avons pu signer un protocole avec le gouvernement le 13 mars 2017. Pour ce qui est des points, nous avons des points en rapport avec les conditions de travail, des points en rapport avec les conditions de vie des agents de santé. Il y a des débuts de mise en œuvre de ce protocole. Pour le respect de tout le protocole il y a des soucis, les conditions de travail sont toujours médiocres,  les questions de carrière des agents sont restées en l’état. Maintenant les luttes syndicales se sont menées dans un contexte avec une gouvernance assez difficile pour les travailleurs de la santé. », fait-il remarquer.

Le secteur des finances n’a pas échappé au cycle des grèves. En 2019, il a été paralysé , rendant les services notamment  le service des impôts inaccessibles aux usagers. Les travailleurs du secteur réclament entre autres le respect de la décision de réintégration  de 3 travailleurs des impôts et la suppression de l’IUTS (Impôt unique sur les traitements des salaires).

Dans le secteur de la justice, les avocats, les gardes de sécurité pénitentiaires (GSP) sont également entrés en grève pour dénoncer le dysfonctionnement de l’appareil judiciaire et exiger le rétablissement des carrières des agents et la réintégration des dix agents révoqués en 2018.

Le 16 septembre 2019, la grève de l’Unité d’action syndicale a été réprimée faute d’autorisation de manifester. D’autres secteurs comme ceux des transports et de l’action sociale ont connu une agitation.

Lors d’une interview accordée le 25 octobre 2020 à la Radiotélévision du Burkina (RTB), le président sortant Roch Marc Christian Kaboré s’est dit favorable à la poursuite du dialogue tout en insistant sur les efforts déjà consentis par le gouvernement à l’endroit les fonctionnaires. 

 « Les fonctionnaires que nous sommes, nous représentons grosso modo 125 000 à 135 000 personnes et notre masse salariale est un peu plus de 800 milliards. Or le budget de l’Etat, c’est pour régler les questions qui concernent tout le Burkina Faso. Et au Burkina Faso nous sommes estimés à plus de 20 millions de personnes. Alors vous voyez bien le décalage. »

Les syndicalistes n’entendent pas s’arrêter là. Ils affirment vouloir continuer la lutte pour la satisfaction totale et complète de leurs différentes plateformes revendicatives.