Jonathan Pitroipa. Le feu follet des Etalons, le renard des surfaces, le magicien, le meilleur joueur de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 2013. Chacun y va de son mot pour qualifier « Pit ». A 34 ans, il annonce voir définitivement rangé les crampons. Entre tristesse et souvenirs des bons moments, des jeunes footballeurs burkinabè disent avoir été marqués par le talent hors du commun du jeune retraité.
Sur la pelouse du stade municipal, le Real du Faso, livre un match amical. Sur le banc de touche, Pihouri Webonga, entraineur et formateur des jeunes a son calepin en main. Entre deux regards inquisiteurs sur le rectangle vert, il griffonne. Celui qu’on appelle « Coach » est fidèle au poste. Il y a plus de 20 ans, il était témoin des débuts de Jonathan Pitroipa à Planète Champion, le centre qui a favorisé l’éclosion du joueur. « Nous l’avons pris très tôt, 13-14 ans. Nous avons travaillé sérieusement (…) Le papa de Pitroipa que je ne connaissais pas est venu suivre l’entrainement et m’a dit, « ce petit-là , est-ce qu’il peut réussir ? Je lui ai dit qu’il sera l’un de nos meilleurs joueurs que nous aurons formé », se rappelle-t-il.
Et le temps semble lui avoir donné raison. Le vieil homme ne cache pas sa joie. « Sérieusement, nous sommes tous fiers de ce jeune-là», dit-il fièrement. C’est le même sentiment de fierté qui anime « Pogba », surnom de l’attaquant du Real du Faso. Le jeune homme d’environ 20 ans ne cache pas son admiration pour la touche de balle, la technique de celui que l’on avait fini par surnommé ‘’l’artiste’’. Fierté certes, mais pas que…Mohamed Lamine Ouattara, attaquant de As SONABEL et actuel meilleur buteur du championnat national ne cache pas son amertume.
« Un peu triste, c’est comme si on a perdu un messie. Pitroipa était comme une étoile pour moi. La première fois que j’ai vu Pitroipa jouer au stade du 4 aout, je n’en revenais pas. Il était très rapide, très technique, il driblait bien. C’est un genre de talent très rare. Qu’il arrête actuellement, ça me fait très mal. J’aurais voulu le voir au plus haut niveau, jouer dans les grands clubs en Angleterre. Mais comme chacun a son choix. On ne peut l’en vouloir ».
Pitroipa, fin d’une légende
Le visage ridé, le pas lent et hésitant, le sourire de Pihouri Webonga rajeuni son visage quand il se remémore certaines actions de « Pit ». « Contre le Togo en demi-finales en Afrique du Sud (Ndlr. Lors de la CAN 2013). Il était à côté de la surface de but du camp adverse. Les gens l’ont vu, il est insignifiant, on l’a négligé. Et quand on a envoyé la balle sur lui, il s’est élevé et il a planté le but dans la lucarne. Vraiment ce but-là, quand je me rappelle, j’ai des frissons », s’extasie coach. « Ses finitions étaient parfaites, sa manière de toucher le ballon, wahoo. C’était de la magie. Ses contrôles, ses touches, ça faisait rêver. C’est une étoile qui nous laisse très tôt », s’émerveille l’actuel meilleur buteur du championnat national.
Pour lui comme pour d’autres jeunes joueurs, l’annonce de Jonathan Pitroipa est précoce. C’est avec une colère non dissimulée que Pihouri Webonga évoque le passé du joueur qui n’aurait pas joué en sa faveur. « Il aurait pu aller plus loin. Notre organisation de football en Afrique et particulièrement au Burkina ne permet pas à ce jeune de faire une grande compétition pour l’aguerrir pendant un certain temps avant qu’il ne parte. Ils (Ndlr. Pitroipa et ses camarades) n’ont pas eu cette chance parce qu’ils ont été bloqués, les clubs ne voulaient pas voir une équipe de jeune qui va les ridiculiser », rappelle Pihouri Webonga qui demande à son ancien élève de ne pas s’éloigner pour autant des terrains. Ce, pour faire profiter son expérience aux plus jeunes.