Poisson vendu aux abords des routes: un risque sanitaire dans les assiettes
Une vue du poisson exposé au bord de la route (Ph. Studio Yafa)

Poisson vendu aux abords des routes: un risque sanitaire dans les assiettes

La vente du poisson aux abords de la route est à la mode à Ouagadougou, notamment à côté du barrage de Tanghin. Cependant, les conditions de conservation de ces poissons laissent à désirer et peuvent causer des problèmes de santé. Pourtant, préviennent les spécialistes, le poisson est fragile et sa mauvaise conservation en fait un nid de microbes.

Installé devant le Parc urbain Bangr-wéogo, Jules Tiendrébéogo, débout, arrose du poisson exposé sur un pousse-pousse qui sert de table. « Nous essayons de donner un peu de fraîcheur. Nous avons une glacière dans laquelle nous mettons de l’eau et de la glace qu’on va utiliser pour asperger le poisson afin que ça garde la fraîcheur », explique Jules Tiendrébéogo, un bidon d’eau à la main.

Jules Tiendrébéogo, vendeur de poissons (Ph. Studio Yafa)

Comme lui, ils sont plusieurs autres vendeurs de poissons installés aux alentours du barrage. En général, ils sortent entre 13h et 15 heures. Le poisson exposé devant le barrage laisse croire qu’il y a été péché. Mais non. Il vient d’autres localités du Burkina Faso. Jules confie que le poisson qu’il vend vient des différents cours d’eau du pays. A ce titre, il cite Piéla (province de Gnagna, région de l’Est).

Basile Zongo, 39 ans, détaille que « les carpes viennent de la Kompienga, les capitaines de Loumbila. On prend du poisson venu du Sourou aussi. Nous n’allons pas pêcher nous-mêmes. On attend sur place à Ouagadougou ».

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Les vendeurs n’ont parfois aucun autre moyen de conserver le poisson exposé à l’air libre que de l’eau glacée. « C’est Dieu qui nous aide ! Nous sommes exposés à beaucoup de choses !», répond un consommateur quand on lui pose la question s’il ne craint pas les conditions de conservation du poisson qu’il achète aux abords des routes.

Pourtant, le poisson est exposé là, parfois entre 13 heures et 19 heures. Si la quantité est énorme et que les vendeurs ne réussissent pas à tout vendre, le reste prend un autre circuit. Jules confie vendre le reste à ceux qui font frire et à ceux qui fument pour revendre. Basile aussi écoule avec les femmes qui vont frire pour leur commerce.

Du poisson décomposé

Pascaline Ouédraogo est une cliente occasionnelle des vendeurs de poisson installés aux abords du barrage. Quelque fois, elle dit avoir acheté du poisson de mauvaise qualité. « Souvent le poisson que nous achetons est décomposé », regrette-t-elle, avant de préciser que cela se reconnait quand le poisson est collant et s’effrite dans l’huile. « En consommant ça, on peut avoir des maux de ventre », avertit-elle. Josué Zongo, un autre client victime ajoute que « souvent il y a des poissons quand on mange, ça provoque la diarrhée ».

Fulbert Nikiéma, directeur du Contrôle des Aliments et de la Nutrition appliquée(Ph. Studio Yafa)

La consommation des poissons exposés aux abords des routes sans parfois aucun moyen de bonne conservation peut causer des problèmes de santé. Il y a de fortes chances que la chaîne de froid soit rompue. Dans ce cas, « il y a possibilité de production, par exemple, d’histamine (…) qui provoque des allergies chez certaines personnes », prévient Fulbert Nikiéma directeur du Contrôle des aliments et de la nutrition appliquée à l’Agence nationale pour la sécurité sanitaire, de l’environnement, de l’alimentation, du travail et des produits de santé (ANSSEAT).

De l’apparence du poisson

Il ajoute aussi que dans certains cours d’eau, des déchets industriels ou même ménagers sont jetés. Ils contiennent parfois des métaux lourds comme le mercure qui peuvent se retrouver dans le poisson. Il y a donc des risques pour le consommateur. De l’avis du spécialiste, les hommes en consommant ce poisson auront des problèmes, car ce sont des produits chimiques et en général, la température de cuisson n’a pas d’effet. Mieux, il pourrait même y avoir d’autres réactions biochimiques qui peuvent entrainer des situations non désirées, poursuit M. Nikiéma.

Le directeur du Contrôle des aliments et de la nutrition appliquée, Fulbert Nikiéma conseille aux consommateurs de toujours vérifier pour s’assurer que les bronches du poisson ne sont pas jaunâtres. « Ça doit être de tendance rouge, mais pas du rouge vif », précise-t-il, avant d’insister que le poisson frais est un aliment fragile et que sa mauvaise conservation favorise le développement des microbes.

Boureima Dembélé