« L’intelligence artificielle est venue démocratiser le savoir », Dian Diallo, formateur digital

« L’intelligence artificielle est venue démocratiser le savoir », Dian Diallo, formateur digital

L’intelligence artificielle est de plus en plus présente dans notre quotidien.  Cependant, certains usagers sont encore réservés par rapport à son utilisation. Mais comment fonctionne cette technologie qui semble capable de tout faire ? Dian Diallo, formateur digital et passionné de l’intelligence artificielle explique les avantages de cet outil pour les africains qui ne devraient pas rester en marge du développement.

Qu’est ce que l’intelligence artificielle?

C’est un outil transversal qui touche tous les domaines des activités professionnelles des êtres humains. C’est un programme informatique qui est intelligent, qui aide l’être humain à gagner du temps. Par exemple, si vous êtes journaliste et que vous finissez votre interview, vous auriez besoin de retranscrire et le publier.

Au lieu de vouloir faire les choses comme aux temps anciens, vous pouvez confier votre fichier à l’intelligence artificielle, elle vous donne la transcription automatiquement en quelques secondes. C’est un programme, c’est un algorithme qui aide à gagner du temps. Elle touche pratiquement tous les domaines d’activité.

Pourquoi les gens ont alors peur de l’intelligence artificielle ?

Il est vrai que nous avons peur de l’inconnu. À chaque fois qu’il y a une innovation, il y a énormément de personnes qui sont dans la résistance, qui cherchent des excuses, qui cherchent les côtés négatifs de l’innovation. Je pense qu’ils ont tort de ne pas utiliser, de ne pas être parmi les premiers à utiliser cet outil parce qu’il va tout changer dans notre avenir.

En quoi l’intelligence artificielle peut-être utile à notre société ?

C’est un outil qui est intelligent, Il aide nous être humains à être beaucoup plus intelligent. Nous êtres humains passons beaucoup de temps à écrire aux clients, à écrire des rapports, des comptes rendus, à participer à des réunions mais aujourd’hui, on ne se fatigue plus. Il suffit de confier la tâche à l’outil de l’intelligence artificielle pour le faire à notre place. Il existe des outils qui peuvent participer à notre absence à des rencontres en ligne. Il enregistre toute la conversation et après, il nous fait le compte rendu des points essentiels de la réunion. Il y en a des milliers dans tous les domaines.

N’est-ce pas légitime d’avoir peur du moment où l’on estime que l’intelligence va remplacer des emplois ?

Il est vrai qu’à force de vouloir employer ces outils, des employeurs ne voudront plus utiliser des personnes qui les retardent parce que l’intelligence artificielle le fait mieux que les êtres humains. Cet outil déplace les métiers. Il ne les remplace pas. C’est un assistant qui aide le développeur à créer plus de codes, à être productif, à ne plus perdre du temps pendant un mois pour créer une application, un logiciel, un code etc. C’est un outil qui aide la secrétaire à bien rédiger une lettre administrative, à bien concevoir et bien présenter le rapport avec des visuels etc. On a besoin d’évoluer avec notre temps. On est dans l’ère de la connaissance. On n’est plus dans l’ère industrielle.

Dans le domaine de l’éducation, beaucoup d’élèves, étudiants utilisent l’intelligence artificielle pour effectuer leurs devoirs. N’est-ce pas dangereux pour l’enseignement ?

Les autorités administratives dans le domaine académique devraient prendre en compte l’arrivée de l’intelligence artificielle pour changer la façon de poser des questions, de donner des devoirs etc. Aujourd’hui, on doit même pousser les étudiants à l’utiliser pour gagner du temps, pour comprendre davantage la science, pour poser des questions complexes. Parce que l’intelligence artificielle parle le langage des enfants. Elle peut expliquer des concepts très compliqués à toutes tranches d’âges. Ce sont les autorités administratives qui doivent aujourd’hui prendre le temps d’étudier cet outil pour intégrer dans l’éducation de base pour les enfants, les adolescents.

Et si les enseignants ne s’adaptent pas ?

Si les enseignants ne s’adaptent pas, ils seront comme les photographes. Il fut un temps où on passait beaucoup de temps dans les studios pour se photographier. Aujourd’hui qui rentre dans un studio pour se faire photographier. D’ici dix ans, chacun de nous aura son enseignant dans sa poche ou même dans ses lunettes. Internet est en train de partir vers des lunettes qui se connectent. Les téléphones vont avoir l’IA qui a toutes les connaissances en ligne. Il suffit de lui poser des questions et il nous répond. Les enseignants doivent donc s’adapter à cette nouvelle réalité et utiliser l’IA comme un outil complémentaire et non pas comme un concurrent.

Hier, ma fille avant d’aller à l’école avec la télécommande, a demandé à la télé s’il allait pleuvoir. Et l’intelligence artificielle lui a répondu. Et vous voyez, l’intelligence artificielle répond et on gagne du temps (…) On doit se mettre à jour sinon beaucoup de gens risquent d’être au chômage. Certains ne seront pas assez dans le siècle comme le disait l’autre. Il faut avoir l’état d’esprit du 21e siècle. (…)

Comment bien l’utiliser pour réussir à l’école ?

C’est une pertinente question. Pour bien l’utiliser, il faut apprendre le langage des prompts. Il s’agit de savoir comment on donne des instructions à l’intelligence artificielle, en particulier ChatGPT. Il y en a d’autres qui vont faire tomber ChatGPT. Il suffit de maîtriser les prompts. Et aujourd’hui, les 500 plus grandes entreprises sont à la recherche des ingénieurs prompts. Et les salaires, c’est souvent 16 millions de francs CFA par mois. Si vous ne me croyez pas, écrivez « ingénieux prompts 308.000 euros » et puis observer le résultat de recherche.

On cherche donc désespérément humains capables de parler à l’intelligence artificielle. Maîtrisez cela et vous allez vraiment vous sortir de tous les problèmes que vous aurez à rencontrer à l’avenir.

Pour vous, c’est donc une opportunité ?

C’est une opportunité. Du jamais vu. Voici un outil qui démocratise le savoir. Par exemple, dans le domaine juridique, si je suis confronté à des problématiques juridiques, je ne connais rien dans le domaine mais avant de voir un avocat, un procureur ou toute autre personne dans le domaine, je peux converser avec l’intelligence artificielle pour m’aider à poser de très bonnes questions. Si je veux voir un médecin, un imam, un mécanicien, je peux aussi utiliser l’intelligence artificielle pour me renseigner sur leurs domaines respectifs. C’est un outil qui nous permet d’accéder à la connaissance de façon rapide et efficace.

Dian Diallo forme également sur l’appropriation des outils de l’intelligence artificielle

Nous devons prendre au sérieux cet outil en 2023. Cet outil est encore à l’étape du balbutiement. Il va devenir beaucoup plus intelligent parce qu’il va être alimenté de données à force de l’utiliser. D’ici dix ans, cet outil sera notre assistant. Il va parler dans notre langue et faire le gros du boulot que nous faisons au quotidien dans le domaine intellectuel et communicationnel. Il faudrait en tenir compte, nous sommes à jamais dans l’ère de l’intelligence artificielle.

Dans des pays peu développés comme le Burkina Faso, comment peut-on utiliser l’intelligence artificielle pour le développement endogène ?

En premier lieu, il faut avoir la curiosité de savoir ce qu’est cette opportunité du siècle. Interrogeons Internet, Google en particulier, YouTube, TikTok, bref toutes les plateformes où on utilise des êtres humains, des communautés, interroger et découvrez comment l’IA peut aider à résoudre vos problèmes. Je pense qu’au Burkina Faso, l’autorité politique devrait aider à augmenter le débit d’internet et à diminuer le coût pour favoriser le développement numérique de la société. Nous sommes partis vers une société 100% numérique.

En deuxième lieu, les affaires, l’éducation, tout va passer par Internet. Même pour les soins à distance avec des médecins qui se trouvent au Kenya, à Singapour, au Japon etc., nous devons entrer dans le village planétaire. Les autorités devraient voir comment sera le monde en 2050 et préparer nos jeunes qui constituent 70% de la population à être compétitifs à notre ère. Augmenter le débit, aidez-nous à avoir la 5G et bientôt la 6G en 2030 et même ouvrir des centres de données pour que nos données soient disponibles pour nous et que nos ingénieurs puissent résoudre les problèmes de sécurité, bref tout ce que nous rencontrons comme problème former des ingénieurs, data scientists, data analystes, des concepteurs d’intelligence artificielle etc.

Est-ce que cela ne va pas accroitre la fracture numérique ?

L’intelligence artificielle fait entrer les populations qui l’utilisent vraiment dans la modernité. Si nous habitons dans un village et que nous avons l’internet, nous sommes en plein 21e siècle. L’IA est venue démocratiser le savoir. J’ai entendu le fondateur de ChatGpt dire que l’IA est venue pour mettre fin à la pauvreté. Je comprends par-là que l’intelligence artificielle est venue pour aider l’être humain à accéder à la connaissance et à corriger les problèmes des êtres humains. C’est quelque chose d’accessible à tout le monde (…) Nous devons passer plus de temps à apprendre à connaître les nouveaux outils.

Comment peut-on utiliser l’intelligence artificielle pour lutter contre le terrorisme ?

Si nos professionnels de sécurité réussissent à partager avec l’intelligence artificielle certaines données fiables, elle peut aider à analyser certains faits et à prendre de très bonnes décisions. S’ils réussissent à parler le langage de l’intelligence artificielle, ils peuvent être plus clairvoyants pour être sur des solutions simples comme les dialogues entre communautés, les stratégies de haute facture pour que l’ennemi puisse nous toucher le moins, pour anticiper parce qu’aujourd’hui, l’intelligence artificielle est en train d’apprendre comment travailler dans la prédiction. Les autorités occidentales veulent même savoir si quelqu’un va faire du terrorisme avant même qu’il ne le fasse ! Ils sont en train de travailler sur la prédiction avec les données. Prenons cela au sérieux, ce n’est pas de la fiction, ce n’est pas pour les occidentaux. Nous pouvons résoudre nos problèmes avec cet outil comme collaborateur et assistant.

Avez-vous quelque chose à préciser sur l’intelligence artificielle ?

Je compte beaucoup sur cette jeunesse. Les Africains sont très intelligents. Malgré les souffrances que nous vivons, nous arrivons à nous tenir debout. Je pense que nous devrions nous passionner de connaissances, de sagesse. Je rêve de voir un stade rempli de personnes venues pour apprendre avec des spécialistes du matin au soir. La connaissance, c’est la solution. Ça donne le pouvoir et la fortune. Si vous êtes jeunes, passionnez-vous de connaissance et ça va changer votre vie.

Entretien réalisé par Boukari Ouedraogo