CAN Côte d’Ivoire 2023 : comment des supportrices burkinabè vivent leur passion dans les stades
Des supportrices burkinabè à Bouaké, janvier 2024. Ph Studio Yafa.

CAN Côte d’Ivoire 2023 : comment des supportrices burkinabè vivent leur passion dans les stades

Le football n’est pas qu’une affaire d’hommes. A la faveur de la CAN 2023, de nombreuses femmes, des Burkinabè, ont fait le déplacement en Côte d’Ivoire pour soutenir l’équipe nationale du Burkina Faso. De tout âge, avec des parcours différents, elles ont bravé de longs kilomètres afin de démontrer leur amour pour ce sport et elles font entendre leurs voix dans les tribunes.

Supportrices Burkinabè à l’entrée du Stade de la Paix de Bouaké, le 20 janvier 2024. Ph Studio Yafa

Christelle, Marie et Jeanne sont trois amies qui vivent à Abidjan en Côte d’Ivoire et qui adorent le football. Quand la CAN 2023 a commencé, elles ont sauté sur l’occasion pour aller à Bouaké soutenir les Etalons, l’équipe du Burkina Faso. Elles se sont habillées comme des joueuses, avec des maillots, des shorts, des chaussettes et des chaussures de sport.

Elles voulaient ainsi afficher leur fierté et se démarquer des autres supporters dans les tribunes du stade de la paix de Bouaké. « On a choisi ce look parce qu’on est fières de notre pays, mais aussi parce qu’on veut faire la différence », confie Christelle.

Pour Julienne Kiénou, le football est une passion qui date de longtemps. Quand elle a appris qu’elle pouvait aller à Bouaké pour encourager les Etalons, elle n’a pas hésité une seconde. « J’aime le football parce que c’est un sport qui demande du tonus, du mouvement. Et c’est ce que je recherche », explique-t-elle. Elle a convaincu ses camarades de se créer un style vestimentaire aux couleurs nationales. Chacune de son côté s’est procurée un maillot et a pris la route de Bouaké.

Exprimer sa fierté

« On veut aussi montrer qu’on est fières de nos origines », ajoute Nadège Kaboré. En effet, certains Burkinabè, à cause de l’histoire socio-politique en Côte d’Ivoire et du concept de l’Ivoirité lancé dans les années 1990, avaient presque honte de revendiquer leurs racines burkinabè. Mais grâce au football et aux succès des Etalons ces dernières années, elles ont repris confiance. « On est là pour supporter notre équipe. On fait la fierté de notre pays d’origine. Il faut être fier », souligne Nadège.

Maman ASFAY et Maman USO au milieu d’autres supportrices burkinabè à Bouaké, janvier 2024. Ph. Studio Yafa

Une fois dans les tribunes, elles comptent bien faire entendre leur voix pour booster Bertrand Traoré et ses coéquipiers. « On est venues comme ça, et on va mettre le feu dans les stades », promet Fatoumata Kaboré. Car le football a permis au Burkina Faso de se faire respecter, avec sa place de vice-champion en 2013, de troisième en 2017 et de quatrième en 2021.

Des succès qui ont redonné à ces jeunes femmes, âgées d’une trentaine d’années, le sentiment d’appartenir à la nation. Fatoumata, Nadège, Julienne sont des exemples de supporters féminines déterminées. Mama Asfa Yennenga et Maman USO sont, quant à elles, des figures emblématiques du football burkinabè.

Lire aussi: CAN 2023, le football, un facteur d’unité entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso

En tant qu’anciennes, elles sont fières de constater que de plus en plus de femmes s’intéressent au football. Car, à leur époque, elles étaient peu nombreuses à pratiquer cette discipline. Les parents s’y opposaient, car le football était considéré comme une activité réservée aux hommes. Les filles qui y jouaient étaient mal vues dans la société.

« J’ai joué au football de 1972 à 1976. J’ai connu toutes les périodes difficiles des Etalons. En 1996 en Afrique du Sud, on a été humiliés. En 2000 au Nigeria, on a même pris 7 à 1. Mais j’étais toujours là, parce que j’aimais le football. Quand on jouait, les gens nous disaient qu’on laissait nos fesses dehors. Finalement, nos parents ont été découragés », raconte Maman USO.

Motiver les plus jeunes

Koumba Sanou dite Maman ASFAY, en référence à l’équipe qu’elle supporte au Burkina Faso, est aussi dans le monde du football depuis plus de cinquante ans. Elle est ravie de voir que de plus en plus de jeunes filles s’intéressent au football. La société est devenue beaucoup plus tolérante. Quand elle était plus jeune, ce n’était pas le cas. Elle remarque cependant que certaines jeunes filles s’engagent comme supporters dans la troupe d’animation de l’UNSE juste pour le profit.

Supporters burkinabè jouant à la trompette à Bouaké, janvier 2024. Ph. Studio Yafa.

Mais le plus important, c’est qu’elles aiment le football. C’est le cas de Adjaratou Soré et Celine Djigma, présentes à la CAN 2023 en Côte d’Ivoire. Elles sont passionnées de musique et de sport, et elles ont rejoint la troupe d’animation de l’UNSE par envie.

« Pour nous, c’était un moyen de nous divertir. Et puis, un jour, on nous a proposé de partir pour la CAN Cameroun. Moi, je n’hésite pas entre un match de football et les télénovelas », déclare Adjaratou Soré, qui vient de finir une séance d’animation avec l’UNSE. Ces deux jeunes femmes savourent leur passion. « Ça me donne l’occasion de voyager, de connaître des régions, des pays, c’est vraiment génial », conclut-elle. A travers cette passion, elles prouvent que le football est un sport universel.

Boukari Ouédraogo

Envoyé spécial à Korhogo