Burkina : Perkoa, difficile vie après la fermeture de la mine
Le chef du village de Perkoa discute avec ses invités (Ph. Studio Yafa)

Burkina : Perkoa, difficile vie après la fermeture de la mine

Perkoa. Un village, Centre-ouest du Burkina, rendu d’abord célèbre pour son importante mine d’exploitation de zinc. Encore plus par le drame du 16 avril 2022 quand 8 mineurs se sont retrouvés coincés sous terre suite à une inondation, avant d’être retrouvés morts plus tard. Depuis, la mine a été fermée par le gouvernement. Un coup dur pour le village et surtout pour les jeunes qui y travaillaient. Alors que les cas de vols augmentent, les villageois espèrent la reprise des activités pour sortir des griffes du chômage.

Perkoa ne fait plus l’actualité. Après le drame et son actualité largement relayée dans la presse nationale et internationale, le village est tombé dans l’oubli. Aucun vrombissement de ces camions qui allaient et venaient jadis. Pas non plus ces jeunes gens qui manifestaient bruyamment leur joie, roulant à vive allure dans cette bourgade située à environ 135 km de Ouagadougou.

Mine de Perkoa, une chambre d’espoir pour les 8 hommes coincés

Morose. Le village est comme privé de ce qui lui était cher et le rendait célèbre : la mine de zinc.
En novembre 2023, le gouvernement annonçait que le permis d’exploitation de Nantou Mining qui exploitait le gisement de zinc était retiré. « Après la crise qui a secoué la mine de Perkoa et malgré les efforts d’accompagnement de l’Etat, la mine n’a pu reprendre ses travaux », justifiait l’exécutif burkinabè. Le 23 septembre 2022, la société annonce la fermeture de la mine. Une décision qui a fait l’effet d’un éboulement dans le village.

Le chef de Perkoa plaide pour la réouverture de la mine (Ph. Studio Yafa)

Sous un arbre dans sa cour royale, le chef de Perkoa devise avec des invités, pour l’essentiel, anciens travailleurs de la mine. Presqu’en chœur, l’assemblée regrette avoir été mise sous le fait accompli. « La mine avait une durée de vie et tout le monde savait qu’elle allait finir par fermer mais subitement ainsi, telle que les choses se sont passées, ce n’est pas bien », se désole l’un des visiteurs. « Je n’étais pas vraiment préparé », renchérit un autre, ex-travailleur. Les autres acquiescent de la tête.

Lire aussi : Site d’orpaillage de Gongombiro, 63 morts et de nombreuses questions

Le chef depuis la fermeture de la mine a une équation quotidienne à résoudre : Le chômage des jeunes. « Les jeunes ne travaillent plus. Ceux qui travaillaient dans la mine sont retournés à la terre », explique-t-il.

Bado Bali est le président du Conseil villageois de développement de Perkoa. Il l’a échappé belle. Le jour du drame, il était dans les tréfonds de la mine mais a réussi à se soustraire avant que l’eau ne l’en empêche. Après y avoir travaillé pendant 12 ans, il est désormais en chômage technique. « C’était un choc pour nous et tout le village. Nous n’étions pas du content» , résume l’ex travailleur après avoir appris la fermeture de son ‘’service’’.

La délinquance en hausse

L’oisiveté est mère de tous vices, dit-on. A Perkoa, c’est le cas. La fermeture de la mine a occasionné une flambée des cas de vols, selon les habitants. Bassama Bado, est Président de la cellule de veille du village, créée pour veiller sur la quiétude de la contrée.

« Il y a des voleurs de bœufs, de cabris. Des gens viennent avec des fusils pour voler. Il y a un lien entre la fermeture de la mine et la délinquance. Nous sommes 40 et chaque nuit, nous veillons pour faire des patrouilles. La mine permettait d’éviter tout cela », note le président.

Lui était jadis conducteur de dumpers. Dieudonné Bado qui s’est depuis reconverti en jardinier en saison sèche et cultivateur en saison pluvieuse, est dans l’équipe de veille du village.

Ecouter: Le secteur minier face aux canons des groupes armés

Sur un air ironique, celui qui semble être le plus jeune du groupe, François Bado détend l’atmosphère quelque peu chargé de tristesse.

François Bado désormais au chômage ironise sur sa perte de poids (Ph. Studio Yafa)

Cultivateur maintenant, il avoue qu’il ne mange plus bien, a perdu sa forme. La vie après la mine est dure, dit-il, comme ses mains à force de labourer à la daba dans les champs. « Je n’ai pas le choix que de cultiver. C’est dur de cultiver, regarder mes mains. Je mangeais bien quand je travaillais à la mine, j’étais en forme. Mais regarder mes yeux même, c’est difficile de les ouvrir».

Il espère, comme les autres, que la bonne nouvelle qu’ils scrutent tous à l’horizon va bientôt arriver : l’annonce de la reprise des activités de la mine.

Tiga Cheick Sawadogo