Burkina: A Bagré, des étudiants en fin de cycle expérimentent les meilleures stratégies dans l’agriculture
Rokiatou Guebré dans un champ d'oignon, Bagré le 3 avril 2024 ©Studio Yafa.

Burkina: A Bagré, des étudiants en fin de cycle expérimentent les meilleures stratégies dans l’agriculture

Le site de l’Agence nationale de la valorisation des résultats de la recherche (ANVAR) à Bagré dans la région du Centre-est accueille des étudiants en fin de cycle. Issus de différentes universités dans les filières agro-sylvo-pastorales, ils y sont depuis plusieurs mois pour produire des semences certifiées. Une occasion de mettre en pratique ce qu’ils ont appris dans les amphithéâtres.

Rokiatou Guebré est étudiante en fin de cycle en production végétale et agronomie. Elle a passé trois ans au centre universitaire de Tenkodogo, dans la région du Centre-Est pour l’obtention de sa Licence. Les cours y étaient surtout théoriques. Alors quand l’opportunité du projet Incubateur de technologies dans le domaine agro-sylvo-pastoral s’est présentée, elle a saisi sa chance. Une aubaine pour confronter les théories apprises à la réalité du terrain.

L’entrée de la zone du projet, Bagré le 3 avril 2024- ©Studio Yafa

Depuis mi-juillet 2023, Roukiatou et une centaine d’autres étudiants en fin de cycle bénéficient d’un encadrement. « Nous avons fait la production semencière pendant la campagne pluvieuse. Et nous avons eu à produire aussi le manioc, la patate douce. En campagne sèche, nous avons produit de la pomme de terre, la tomate, l’oignon et le blé », explique-t-elle, visiblement satisfaite.

Adeline Sawadogo, elle, vient de l’université Norbert Zongo de Koudougou. En ce début de matinée du mois d’avril, elle sillonne un périmètre d’exploitation de tomate sur le site de l’Agence nationale de valorisation des résultats de la recherche (ANVAR). De temps en temps, elle marque un arrêt, s’accroupit, inspecte les feuilles. Sur une superficie d’un hectare, la jeune fille travaille avec un groupe de 12 personnes. Avec enthousiasme, elle exprime sa joie de faire partie de la première promotion de ce projet d’incubation.

De semencier à acteur direct de l’autosuffisance alimentaire

Les étudiants incubés devraient produire des semences certifiées améliorées au profit des agriculteurs. Au bout de quelques mois, les jeunes agro-entrepreneurs ont pu mettre à disposition des semences certifiées de près de 8 tonnes composées de riz, de soja et de maïs à haut rendement. « Ils ont été initiés et formés sur la loi semencière d’abord. Et après ça, en saison pluvieuse, nous avons produit de la semence avec eux. Et eux-mêmes, ils ont totalement géré ces parcelles. Donc nous avons même de la semence stockée (…) c’est eux-mêmes qui ont fait la mise en place de la pépinière, l’entretien des plantules, l’aménagement des parcelles, le repiquage, les différents sarclo binage et l’application des engrais », explique avec fierté Jean-François Somé technicien supérieur en agriculture, un des encadreurs des incubés.

Adeline Sawadogo aux abords de sa plantation de tomates, Bagré le 3 avril 2024- ©Studio Yafa

Après la production des semences qui s’est avérée concluante, le séjour des protégés de l’ANVAR qui était de 6 mois a été prolongé. Cette fois l’objectif est de produire pour la consommation. « Le ministre nous a rendu visite et nous avons demandé la prolongation de notre séjour pour expérimenter les cultures maraîchères. Etant donné qu’on travaille également pour l’atteinte de l’autosuffisance alimentaire, on a dit qu’on aurait besoin d’une formation complète. Mais là, c’est uniquement, c’est pour la consommation. On a produit de la tomate, du blé, de la patate douce à chair orange, du manioc, etc. », relève Abdoul Kader Badélé, répondant de la promotion. Il ne cache pas sa joie de contribuer à l’atteinte de l’autosuffisance alimentaire au Burkina, surtout en ces temps de crise sécuritaire et humanitaire.

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Le projet Incubateur de technologies dans le domaine agro-sylvo-pastoral est à sa première phase. Jean-François Somé est un encadreur comblé au regard des résultats engrangés. Pour lui, le passage à Bagré pour ces étudiants en fin de cycle leur permet de compléter leur formation débutée entre quatre murs. « Les étudiants qui sortent avec une licence en agronomie ont tendance à repartir s’asseoir dans un bureau bien climatisé pour estimer les rendements par plante et communiquer. Cela peut fausser certaines choses », constate le formateur.

Par contre, après près de dix mois sur les plaines agricoles de Bagré, chaque pensionnaire maîtrise le processus de production de la semence de plusieurs variétés. « Vous ne pouvez pas prendre un étudiant incubé ici, et demander comment on fait la tomate, et qu’il ne puisse pas vous expliquer, ni la pomme de terre, l’oignon et d’autres spéculations. C’est vraiment ça que nous, nous cherchons. Ça, en tout cas, sur le plan technique, nous sommes vraiment satisfaits», témoigne un formateur.

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En plus, l’un des objectifs du projet, a poursuivi Jean-François Somé, c’était «de montrer à ces jeunes, que sans intégrer même dans le gouvernement, on peut aussi être indépendant et revenir même en aide pour ce gouvernement ».

Dans quelques semaines, le séjour des 32 bénéficiaires du projet prendra fin sur les plaines de Bagré. Ils espèrent pour l’essentiel, s’installer à leur propre compte pour produire et être des sources de motivation et des modèles pour d’autres jeunes. Une ambition d’agro-entrepreneurs qui a déjà reçu des promesses de financement du chef de l’Etat en visite sur le site.

Tiga Cheick Sawadogo