A Ouahigouya, l’un des plus anciens lycées du Burkina Faso est devenu un véritable lieu de passage. Élèves et enseignants doivent supporter les bruits des motos qui perturbent l’enseignement et les études au sein Lycée Yamwaya. 77 ans après sa création, le Lycée est toujours sans clôture.
Entre motos pétaradantes, passants pressés et animaux errants, les élèves du lycée Yamwaya tentent d’apprendre dans une cour sans murs, où l’insécurité s’invite chaque jour en plein cours.
C’est un matin ordinaire au secteur 10 de Ouahigouya. Des motocyclistes foncent à toute allure, frôlant les élèves en uniforme. Certains passants s’engagent nonchalamment entre les salles de classe. D’autres coupent la cour, sacs à dos en bandoulière, sans se soucier des regards agacés. Nous sommes pourtant en pleine heure de cours, mais la cour du lycée Yamwaya Hamadé Youssouf Ouédraogo est devenue un véritable carrefour.
« Vous avez constaté quand vous êtes arrivé que l’établissement n’est pas clôturé. Ce qui fait que c’est devenu une passoire pour tout le monde, même souvent pour les animaux », déplore Issa Porgho, proviseur du lycée. Fondé en 1948 sous l’administration coloniale française, le lycée Yamwaya, troisième plus grand du Burkina Faso après le lycée Zinda Kaboré de Ouagadougou et le Lycée Ouezzin Coulibaly à Bobo-Dioulasso, fait face à une situation préoccupante.
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77 ans après son ouverture, l’établissement ne dispose toujours pas de clôture. Une anomalie qui a transformé la cour de récréation en voie de passage. Elle expose les enseignants, élèves et visiteurs à des dangers comme la divagation d’animaux, les vols, des violences ou encore des collisions.

« On a eu des cas d’accidents où des usagers sont rentrés en collusion avec nos élèves. On a eu des visites des fous qui sont venus dans les salles de classe et agressé certaines personnes », s’indigne le professeur de français, Pamakdé Bécayé Ouedraogo. Lorsqu’il y a des manifestations, le lycée est rapidement envahi par des manifestants. « Nous ne sommes pas en sécurité », ajoute-t-il.
Malgré la présence de vigiles et de barrières artisanales, la cour reste poreuse. Les intrus s’y infiltrent sans difficulté, perturbant les cours et semant l’insécurité. Les encadreurs sont obligés de vivre avec. « C’est un lieu où on ne peut pas bien maîtriser la cour, insiste le proviseur, de sorte que pendant les cours, il y a des intrus qui viennent s’infiltrer et ça crée des difficultés dans le cadre, tout naturellement, du déroulement du cours ».
De promesses non tenues
Face à cette situation, plusieurs tentatives de clôture ont été entreprises. L’une des plus médiatisées fut le projet « Une brique pour le lycée », porté en son temps par Alassane Bala Sakandé, ancien président de l’Assemblée nationale et ancien élève du lycée. Mais l’initiative est restée lettre morte. « Les gens avaient lancé ça sous l’angle politique », regrette Philippe Sawadogo, secrétaire général de l’Amicale des anciens élèves. Alassane Bala Sakandé n’étant plus aux affaires, le projet n’a pas survécu. « On a attendu mais aucun point ne nous a été fait », fait-il savoir.
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Aujourd’hui, même les autorités éducatives locales reconnaissent l’urgence. Mais, elles estiment n’avoir pas les finances nécessaires pour entreprendre des travaux. « On ne peut pas dire par exemple qu’il y a une ligne budgétaire prévue pour cela », reconnaît Bédaré Albert Ouedraogo, directeur provincial de l’enseignement secondaire, de la formation professionnelle et technique du Yatenga. Toutefois, des réflexions sont en cours pour résoudre le problème. Il s’agit de mener des campagnes de sensibilisation et mobiliser les fils de la localité pour trouver des ressources.
Avec ses 46 salles de classe et ses 2 462 élèves, le lycée Yamwaya accueille également deux écoles relocalisées pour cause d’insécurité. Et pourtant, il reste sans enceinte pour protéger ceux qui y étudient et y enseignent.
Mansour Gassambé
Collaborateur