Le Stade du 4-Août de Ouagadougou a accueilli les Étalons du Burkina Faso et son public à la faveur du match contre les Pharaons d’Égypte. Pour cette réouverture après quatre ans d’attente, c’est une ferveur populaire qui a animé la journée du 9 septembre 2025.
En ce mardi, jour ouvrable à Ouagadougou, le quartier Gounghin, qui abrite le Stade du 4-Août, grouille de monde. Il est déjà 14h00. A deux heures de la rencontre, à près de trois kilomètres de l’enceinte, la circulation est un véritable casse-tête. Des embouteillages serrés, motos et voitures peinent à avancer. Les parkings débordent, mordant sur la chaussée.
Par vagues, des jeunes à moto, vêtus de blanc aux couleurs des Etalons, débarquent comme une caravane improvisée. Leur passage force automobilistes et motocyclistes à se ranger, certains tenant fièrement le drapeau rouge-vert marqué de l’étoile jaune.

A environ deux kilomètres du stade, il faut poursuivre le parcours à pied. Beaucoup abandonnent leur voiture et terminent en marchant sous la fine pluie qui transforme les portions de route encore en travaux en boues. Le son perçant des vuvuzelas se fait entendre continuellement. Installés à même le sol, de jeunes vendeurs disposent leur marchandise. Il s’agit de sifflets, de maillots aux couleurs nationales, des autocollants et gadgets divers.
Une aubaine pour les vendeurs
Amadou Guiébré ne va suivre le match qu’à travers un poste radio solaire posé sur son tricycle. Pour le moment, il veut profiter de cette aubaine pour écouler sa marchandise. « Sincèrement dit ça marche. Ce que je vais gagner, je ne peux pas estimer parce que ça ne se passe pas quotidiennement », glisse Amadou Guiébré, entre plusieurs clients. Vu la foule, il doit veiller à ne pas se faire voler. Ces marchandises sont abordables. « Autocollant 100 f, chapeaux, 1000 f tout est négociable », ajoute-t-il tout.

Salimata, vendeuse de boissons et sucreries observe le flot de supporters en s’abritant sous son parasol. Elle également veut profiter de cette journée inhabituelle. Pour cela, elle a dû batailler dur pour trouver cet espace du fait des consignes sécuritaires. Pour éviter des débordements, la sécurité a interdit le commerce à certains endroits. Mais tout va bien. « On ne se plaint pas. On espère avoir un peu d’argent aujourd’hui », dit-elle.

Certains supporters, trempés mais obstinés, patientent dans de longues files, leurs maillots floqués du nom de leur joueur favori. Plus on se rapproche du stade, plus le monde est impressionnant, plus les vuvuzelas saturent l’air humide. « Vous voyez le monde, on ne sait même pas si on va arriver au stade », lâche Abdoul Karim Kiemdé inquiet. Il se demande même sur le stade a la capacité de recevoir tout ce beau monde.
Pas de stade sans le billet d’entrée
Des enfants profitent de l’événement pour vendre quelques petites marchandises comme des bonbons, des biscuits. D’autres ont trouvé autres choses. Certains proposent des décorations sur le visage ou le bras. 100, 200, 300 francs ou plus selon la fantaisie du dessin. La sécurité, parfois des pick-up ou à pied, des matraques en main, est omniprésente.

Des points de contrôle sont installés à chaque accès. Les supporters doivent patienter ticket en main. Mais pour certains, c’est la déception. Ils ne peuvent pas aller plus loin. « Je suis allé pour acheter un ticket. Mais je n’ai pas trouvé. Je pensais que j’allais en avoir ici », explique un jeune homme maquillé aux couleurs des Étalons, obligé de rebrousser chemin. La FIFA a interdit la vente de tickets les jours de match.
Pendant ce temps, des agents orientent la foule. « Même ceux qui ne s’intéressent pas au football sont là aujourd’hui », ironise Mariam qui vient pour la première fois au stade. Sa copine Aminata Ouédraogo d’ajouter : « On est motivées. On a hâte d’entrer pour visiter notre stade ».
En famille au stade
IDes familles entières ont fait le déplacement. Ibrahim Tarnagda, est en compagnie de ses enfants. il a décidé de les emmener au stade « C’est la réouverture. C’est le premier match. Il fallait qu’on soit là. Je suis là avec ma famille. Cela fait quatre ans. La cuvette du Stade du 4-Août de Ouagadougou nous a tellement manqué qu’il fallait qu’on soit là », lance-t-il. Donald Yonaba, lui aussi, accompagné de ses enfants, va dans le même sens. « Je voulais que les enfants profitent de l’ambiance et qu’ils profitent de la réouverture du Stade », avoue-t-il, prêt à patienter.

La réouverture en compétition officielle oppose les Etalons du Burkina Faso aux Pharaons d’Egypte. Une équipe que le Burkina Faso n’a jamais battu. Mais chez les supporters, la confiance semble régner. « Nous avons déjà gagné. Nous venons juste pour célébrer. Sinon la victoire est déjà en poche », annonce Taofik Sawadogo, sûr de son pronostic de 3-0.
A mesure que l’affluence grossit la tension également grimpe. Sous la pluie, des supporters pressés forcent une barrière, déclenchant une brève panique. Les agents reprennent vite le contrôle. Plus loin, un autre point de passage impose des fouilles strictes. « Les briquets, les objets pointus, les parapluies sont interdits, les bouteilles d’eaux sont interdites », crie un agent.
Ferveur dans le stade
Certains abandonnent leurs powerbanks, casques de moto ou parapluies pour franchir la sécurité. L’essentiel, c’est d’accéder au stade. Mais certains ont du mal à s’orienter. « J’ai mon ticket mais je ne sais pas où se trouve la porte d’entrée », explique un jeune homme complètement désorienté. Il a un secours grâce à un agent de sécurité. « Certains ne regardent pas bien. Tout est écrit sur le ticket, le numéro de porte ».

15h30, le stade du 4-Août est presque plein. Le speaker Paul Gasbeogo, voix bien connue de la radio burkinabè, galvanise la foule en criant : « Etalons ??? », « Ya buut !!! », répond en chœur le public en ébullition. Les joueurs entrent pour l’échauffement sous une clameur sourde. Après l’hymne national et la photo d’équipe, le match commence. Pendant 90 minutes, la cuvette du 4-Août vibre d’une ferveur qu’elle n’avait plus connue depuis quatre ans. Le coup de sifflet final scelle un nul (0-0) qui laisse des sentiments mitigés.
« L’Egypte pensait venir se qualifier ici ce soir. Mais ce soir les Etalons nous ont vraiment honorés. On croit qu’on peut toujours se qualifier », se réjouit Michael Ziboth, avant de faire une remarque : « prochainement, il ne faut pas nous mélanger avec des gens qui ont payé 2000 alors que nous avons acheté notre ticket à 5000 ». « Vu qu’il y a longtemps qu’on n’a pas joué à domicile, on devait faire mieux. Si on ne bat pas les grandes équipes, qu’est ce qu’on va aller faire à la Coupe du monde », s’interroge Souleymane Tindamba, un brin amer.
Prochain rendez-vous pour les Étalons : octobre, face à l’Éthiopie, sur cette même pelouse du 4-Août. Le stade, lui, a retrouvé son souffle et son peuple.
Boukari Ouédraogo