<strong>Université Norbert Zongo : Celui qui se bat pour la place, c’est pour lui la place</strong>

Université Norbert Zongo : Celui qui se bat pour la place, c’est pour lui la place

Retards des années académiques, conditions de vie difficile, taux d’échecs et d’abandons assez élevé, insuffisance d’infrastructures, bref, la situation à l’Université Norbert Zongo de Koudougou n’est guère reluisante. Deuxième plus grande université du Burkina Faso, elle compte à ce jour,  64 000 étudiants pour moins de 7000 places assises alors que 14 000 nouveaux étudiants sont annoncés pour la rentrée universitaire 2022-2023.

Université Norbert Zongo de Koudougou. Unité de formation en lettres sciences humaines (UFR-LSH), surnommée « Chine populaire ». C’est l’UFR qui concentre le plus grand nombre d’étudiants. Pour avoir une place, il faut venir avant l’heure, soit apporter sa propre chaise. Une autre option qui s’offre aux filles, c’est d’étaler un pagne au sol pour suivre le cours. Abdoul Aziz Zongo, étudiant en 3e année de sciences économiques et de gestion se rappelle encore de ses débuts.

En 2018, il fallait venir à 05h du matin car les places se faisaient rares. « Pour une promotion de 1500 étudiants, il y a des salles de 500, 600, 750 places. Il faut se battre pour avoir la place parce que le nombre d’étudiants dépasse carrément le nombre de places disponibles » dit-il.

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Aujourd’hui délégué de sa promotion, il lutte désormais pour ses camarades. « C’est très difficile. Il faut aller attendre sous le soleil pour qu’une promotion finisse afin que tu rentres avec tes camarades » regrette le jeune homme.

La programmation des cours

Ferdinand Wilfried Bazo a passé 4 années sur les bancs au lieu de 3 pour obtenir sa licence en Lettres modernes.  L’une des raisons qu’il évoque est la programmation cavalière des cours. « La promotion a été divisée en trois cohortes. La première cohorte prend cours de 7h à 11h, la deuxième, de 11h à 15h et la troisième, de 15h à 21h tout cela ne fait qu’accentuer le retard » regrette l’étudiant d’un ton très remonté.

Quand une promotion repartie en cohorte occupe un amphithéâtre pour épuiser un module, cela peut durer plusieurs semaines. Pendant ce temps, il y a d’autres promotions qui attendent à la maison. « Tout cela fait qu’on n’avance pas, d’où le retard » ajoute-t-il.

Le manque de salles pour toutes les promotions conduit parfois à des affrontements entre étudiants. « Il arrive qu’on programme deux promotions différentes à la même heure dans une même salle. À plusieurs reprises des promotions se sont affrontées devant les amphithéâtres » ajoute Wilfried. Nos tentatives pour rencontrer l’administration n’ont pas abouties.

Des salles de spectacles transformées en amphithéâtres

L’Université Norbert Zongo dispose de deux grandes salles de cours avec 1000 places chacune. Une offre très loin de la demande. Pour remédier à cela, les responsables de l’université ont fait recours à des salles plus vastes hors du campus où les étudiants prennent régulièrement cours.

Parmi ces salles, « il y a la salle polyvalente, plus de 2000 places assises dont la location coûte à l’université 3 millions de francs CFA le mois donc 36 millions l’année. En plus il y a la salle olympique, transformée en salle de cours après la fermeture de l’usine Faso Fani (Ndlr.). Le troisième bâtiment qui accueille les étudiants est l’aumônerie scolaire » raconte Wilfried Bazo. Ces salles assez vastes qui peuvent recevoir près de 2000 étudiants mais là également, des difficultés ne manquent pas. Il faut transformer sa cuisse en table.

« Puisque ce sont des salles construites pour des spectacles, il n’y a pas de tables sur lesquelles on peut écrire c’est le cas de la salle polyvalente. Tu fais comme tu peux pour noter soit tu déposes ton cahier sur ta jambe soit tu étales un pagne au sol » regrette Pascal Yaméogo, étudiant en 1re année de lettres modernes.

Agir malgré les difficultés

Tout n’est pas rose à la l’Université Norbert Zongo, certes. Mais c’est une fierté pour ces étudiants de faire partie de ce temple du savoir. Ils font preuve d’une solidarité agissante et demeurent convaincus qu’ensemble ils peuvent réussir à sortir la tête de l’eau.

« Nous sommes une famille ici. Il y a un soutien mutuel entre nous, que ca soit pour le restaurant universitaire, des problèmes personnels et autres, on se soutient » affirme Aziz Zongo. Outre cela, les étudiants de l’Université Norbert Zongo brillent sur le plan national et international dans les disciplines culturelles et sportives. « Cette année à l’occasion de la semaine nationale des arts et de la culture des universités du Burkina, les étudiants de notre université ont remporté presque tous les prix notamment en slam, danse, poésie, art oratoire » poursuit-il.

Toutefois, les étudiants demeurent convaincus qu’ils trouveront leur place dans le monde professionnel, car la formation qu’ils reçoivent  est de qualité. Comme pour se donner du courage face aux difficiles conditions de vie et d’études, ils se répètent que « ce sont les souffrances d’aujourd’hui qui permettent de savourer les victoires de demain ».

Faysal Ouédraogo