Eddie Komboïgo : à la reconquête d’un pouvoir perdu avec le CDP
Eddie Komboïgo est convaincu d'être le prochain président du Faso

Eddie Komboïgo : à la reconquête d’un pouvoir perdu avec le CDP

Expert-comptable, homme d’affaires prospère, Eddie Komboïgo est descendu dans la l’arène politique burkinabè il y a quelques années. Agé de 56 ans, celui qui se considère désormais comme l’héritier politique du président déchu Blaise Compaoré, est confiant pour l’élection présidentielle de novembre 2020. Il en est convaincu: Le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) ancien parti au pouvoir dont il défend les couleurs va reprendre le pouvoir perdu en 2014.

Le ‘’V’’ de la victoire, il le présente à chacune de ses apparitions publiques. C’est devenu son signe distinctif quand il est face à ses militants. Eddie Komboïgo le patron du célèbre cabinet d’expertise comptable CAFEC-KA est connu pour être un homme d’affaires prospère. Il a décidé de descendre dans le ‘’marigot politique’’ burkinabè. Depuis, des coups, il en reçoit. Un séjour en prison, un domicile incendié, des procès avec des anciens camarades du parti. Mais pour Eddie Komboïgo, il n’est pas question de jeter l’éponge ni de regretter son engagement en politique.  « Tout cela m’a d’ailleurs stimulé. J’aime l’adversité. Ils m’ont dit que je vais dans la marre aux caïmans. Ça m’a fait rigoler, je dis vous savez d’où je sors ? De l’océan des requins. Vous imaginez un requin qui arrive dans une marre de caïmans, mais il va les avaler tous. Ceux qui se sont mépris sur ma personne apprennent à leurs dépens », image-t-il, avec un brin de d’ironie.

Son engagement en politique est guidé selon lui, par la volonté de mettre à profit son expertise acquise dans sa carrière professionnelle pour développer son pays. « Lorsque vous êtes expert-comptable, vous êtes amené à analyser, à revisiter, à contrôler, à encadrer des organisations publiques, privées, nationales ou internationales. Vous vous rendez compte qu’il y a des obstacles qui empêchent nos structures de se développer, qui freinent notre pays dans son développement, le pas est vite fait d’aller donner son savoir en politique », explique l’homme d’affaires et candidat à l’élection présidentielle du 22 novembre. Dans la préface du livre ‘’Eddie Komboïgo : Mon ambition pour le Burkina Faso’’, l’ancien Premier ministre Luc Adolphe Tiao écrit qu’il est un animal politique. « Pugnatif, il n’a pas peur de l’adversité. (…) assurément, c’est l’un des hommes politiques de sa génération qui marquera l’histoire de son pays », estime l’ancien chef du gouvernement. L’homme est également présenté comme un philanthrope, un homme généreux. « Sur le plan humain, il est non seulement accessible, mais il est également sensible aux questions des autres, aux questions sociales, au sort de ceux qui sont défavorisés », soutient Achille Tapsoba, vice-président du CDP.

Une expérience politique sur le tard et les écueils

La politique s’est invitée sur le tard dans la vie de Eddie Komboïgo. L’homme s’est d’abord attelé à se construire une vie professionnelle. Né le 11 septembre 1964 à Ouagadougou, il va poursuivre ses études en France après un Bac G 2. De retour au pays, il donne cours à l’université de Ouagadougou, question dit-il, de payer sa dette envers son pays. Dans les facultés de Sciences économique et de gestion, et Sciences juridiques et politiques, il y passe 20 ans, de 1994 à 2014. Selon sa femme, Nicole Komboïgo, durant tout ce temps, il reversait ses honoraires à la chorale saint Camille de Ouagadougou, « Il est très généreux, je l’ai toujours connu comme ça », disait-elle à l’émission Café diffusée sur la télévision BF1 le 31 Mai 2020.

Originaire de la province du Passoré dans la région du Nord, Eddie Komboïgo est élu député de cette circonscription en 2012. Le baptême de feu en politique est couronné de succès. Mais le mandat n’arrivera pas à échéance, puisqu’écourté par l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014. Eddie Komboïgo présenté comme très proche de Gilbert Diendéré qu’il appelle d’ailleurs ‘’grand frère’’ et de sa femme Fatou Diendéré, fait les frais de la furie des insurgés. Sa maison est mise à sac et incendié.
Le 9 juillet 2015, l’organe mis en place pour restaurer le parti après la perte du pouvoir choisi l’expert-comptable pour défendre les couleurs du parti à l’élection présidentielle d’octobre 2015. Mais la loi dite loi « shérif » (du nom du président de Conseil national de la transition d’alors, Shérif Sy) frappe d’inéligibilité Eddie Komböigo et plusieurs autres candidats qui ont soutenu le projet de modification de l’article 37 à l’époque, pour permettre à l’ex-président Blaise Compaoré de se maintenir au pourvoir.
Le 16 septembre 2015, un coup d’Etat est perpétré contre le pouvoir de la transition par Gilbert Diendéré et ses hommes de l’ancienne garde prétorienne. Le coup est mis en échec. Eddie est interpellé en janvier 2016. Il lui est reproché son soutien au putschiste. L’homme d’affaire est inculpé pour complicité avec les putschistes et incarcéré à la Maison d’arrêt et de correction des armées (Maca) où il passera plus de 4 mois de détention. Finalement, il sera totalement blanchi dans ce dossier un an plus tard.

Fronde interne

Après cette parenthèse, Eddie Komboïgo reprend les rênes du CDP pour un mandat de trois ans. Les dissensions se font alors jour au sein de l’ancien parti au pouvoir. Une guerre de positionnement. Plusieurs défections sont enregistrées. Parmi elles, des membres fondateurs. « Quelques militants ne comprenaient pas parce que ce n’était pas les mêmes méthodes de travail. Ils l’ont appris à leur dépens parce que ma vision c’est de mettre une bonne dose de démocratie pour écouter les militants, les populations et aller dans le sens des besoins du peuple », tranche-t-il. A l’issue des primaires organisées au sein du parti pour choisir le candidat à l’élection présidentielle du 22 novembre 2020, Eddie Komboïgo est retenu et investit. Mais, la cassure est là, même si le président du CDP refuse à l’admettre. Des personnalités considérées comme des caciques ont rompu les amarres avec lui. Entre autres, Kadré Désiré Ouédraogo (lui-même candidat à l’élection présidentielle), Léonce Koné, Salia Sanou, Mahamadi Kouanda… Alors le CDP un parti brinquebalant à la conquête du pouvoir ? « Vous faites rigoler », répond le patron de CAFEC-KA. Pour lui, il était temps que ces vieux routiers de la politique fassent place à une nouvelle génération. « Même si les événements des 30 et 31 octobre n’étaient pas arrivés, à un moment il faut savoir partir. Personne n’est éternel sur terre. Il faut que l’on intègre que nul n’est indispensable. Certes, il y en a qui sont plus expérimentés, il faut toujours s’appuyer sur l’expérience. Mais il faut savoir construire sa voie, et amener le peuple burkinabè à partager vos rêves », explique le candidat.

Ses relations avec l’ancien président du Faso

Eddie Komboïgo se présente comme un héritier politique de l’ancien président Blaise Compaoré. Sur les réseaux sociaux il n’hésite pas à s’afficher avec son mentor quand il est de passage à Abidjan où le chef de l’Etat s’est réfugié après avoir été chassé du pouvoir. « Je suis président du CDP qui a été créé par le président Blaise Compaoré. Donc je suis forcément l’un de ses héritiers. Après Eddie, il y aura d’autres héritiers. En attendant, j’en suis le premier héritier », clame-t-il avant d’ajouter qu’il entretien « d’excellentes relations », avec l’exilé politique auprès de qui, il dit bénéficier de conseils avisés. Mais, il précise qu’il n’est pas « yes man », une marionnette de l’ancien président. « J’ai ma voie que je trace, avec ma personnalité, ma manière de voir les choses ». C’est cet homme qui s’engage à la conquête de Kossyam. Selon lui, la situation socio-politique du pays depuis l’arrivée au pouvoir du MPP parti au pouvoir est chaotique, ce qui lui offre une chance de bénéficier de la confiance des électeurs. « On ne fait que nous embourber dans les enfers. La gouvernance de Roch Marc Christian Kaboré est catastrophique (…) », regrette-il. L’un de ses chantiers sera la réconciliation nationale. Confiant d’une victoire certaine, il rassure déjà son principal challenger. « Le CDP ne revient pas au pouvoir pour se venger. Je vous donne ma parole d’honneur. Que Roch Marc Christian Kaboré soit serein, que Simon Compaoré soit serein. Eddie Komboïgo ne fera pas la chasse aux sorcières. Que leur expérience nous serve »