Réinsertion scolaire : un stage de recyclage pour des élèves déplacés internes©Studio Yafa
A travers un stage de recyclage, ces élèves déscolarisés pourront suivre un cycle normal

Réinsertion scolaire : un stage de recyclage pour des élèves déplacés internes

C’est une seconde chance pour eux. Des élèves déplacés internes de Ouahigouya, déscolarisés pourront rattraper leur cycle scolaire. Ce, grâce à un programme de recyclage afin de reprendre leur cursus scolaire normal à la rentrée scolaire 2022-2023. En cette période de vacances, pas de repos donc. En attendant la rentrée, les enseignants eux sont dans une course contre-la-montre. 

Pour Aïna Sawadogo, 10 ans, élève en classe de CM1, c’était la fin d’un rêve. Devenir enseignante. La jeune fille est déscolarisée du fait de l’insécurité.  Elle a dû fuir Thiou avec ses parents à cause de l’insécurité. Le désespoir s’était installé. Mais voilà. Une nouvelle occasion s’offre à elle. Aïna a retrouvé le chemin des classes à la faveur de la mise en place d’un programme de récupération et de réinsertion des élèves déplacés internes.

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Nous la rencontrons après qu’elle ait fini un cours.  « On a fait un cours de vocabulaire et nous avons traité des exercices. Madame nous a demandé de trouver des racines et des suffixes de certains mots », affirme Aïna l’air intimidée.

Mais la jeune fille est consciente de l’importance pour elle de retourner à l’école. « Je suis contente de revenir à l’école parce que je pourrai enfin avoir de nouvelles connaissances et j’espère un jour enseigner d’autres enfants à mon tour », ajoute-t-elle, cette fois toute enthousiaste.

Comme Aïna, plus de mille élèves sont déjà inscrits dans le programme de récupération et de réinsertion des élèves déplacés internes déscolarisés. A Ouahigouya neuf sites sont aménagés pour accueillir ces élèves. Cinq sites relèvent de la circonscription d’éducation de base (CEB) de Ouahigouya I et quatre sites de la CEB Ouahigouya II.

Pour ce programme, les enseignants doivent aller à l’essentiel. « Nous essayons de faire des exercices de consolidation surtout en français et en calcul. Aujourd’hui par exemple, on a révisé le carré et le rectangle. A l’issue de cela, je leur ai demandé dans un problème de me calculer le demi périmètre, le périmètre du jardin et de trouver la longueur totale du grillage pour entourer le jardin », explique Ouédraogo/Savadogo Assita, la titulaire de la classe multigrade CE1–CE2. Cette classe compte une soixantaine d’élèves sur le site de l’école Wendpouiré. La classe de CM1 du même site compte près de quatre-vingt élèves inscrits.

Des effectifs pléthoriques

Les élèves inscrits sont issus pour la plupart des zones à fort défis sécuritaire : Kaïn, Namissiguima, Zogoré, Titao. Sur le site de l’école primaire publique Gondologo A à une dizaine de kilomètres du Kaïn, la classe de CP1, à elle seule, compte quatre-vingt-dix élèves. Les effectifs pléthoriques sont un défi pour l’administration. « On était parti sur la base de 50 élèves par niveau. Aussi le matériel que nous avons reçu est venu sur la base de cette prévision. Avec l’explosion des effectifs, forcément il y a des élèves qui sont sans matériel. Ce qui ne facilite pas le travail », déplore le directeur du site Gondologo « A », Modibo Sawadogo.

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Pour faciliter l’apprentissage de ces élèves, l’Etat et ses partenaires ont mis à la disposition de chaque élève inscrit un kit scolaire comprenant un sac d’écolier et des fournitures scolaires.

Les enseignants ont bénéficié d’une formation spécifique pour appliquer un programme d’éducation en situation d’urgence. Ce programme selon le directeur provincial de l’éducation préscolaire primaire et non formelle du Yatenga permet en quatre mois d’activités effectives à l’apprenant d’acquérir les mêmes compétences que l’enfant qui a suivi une année scolaire entière d’octobre à juin.

« C’est le programme entier de la classe de CE2 que je déroule avec les élèves. Cela permet de mettre tous les élèves sur le même pied. En plus j’applique la pédagogie différenciée c’est-à-dire que je prends chaque enfant en fonction de son niveau de compréhension. Cela permet de relever facilement le niveau de ceux qui sont à la traine » explique Salam Ouédraogo enseignant titulaire de la classe de CE2 à l’école Pèèla.

Plusieurs élèves récupérés

Après un mois d’activité intensive, les élèves des niveaux CP1 et CP2 ont retrouvé les automatismes de lecture. Mais certains élèves du niveau CM1 ont du mal à assimiler les leçons. « Il y a des élèves qui sont arrivés ici. Ils ont juste donné une classe qu’ils fréquentaient et on les a inscrits sans savoir depuis combien de temps ils ne sont plus à l’école. On a des élèves de CM1 qui ne pouvaient même pas faire le déchiffrage de base. C’est quand on a poussé l’entretien qu’ils ont affirmé que depuis 3 ans ils ne sont plus allés à l’école » remarque, Amadou Maïga, enseignant de la classe de CM1.

Le programme est censé prendre fin au 30 octobre 2022 avec les évaluations finales. Tous les élèves qui auront la moyenne de passage iront en classe supérieure. Au cas échéant, l’élève reprend la classe. L’avantage selon le directeur, c’est de ramener tous les élèves inscrits dans le système éducatif.

En rappel plus de quatre mille écoles fermées, 20 mille 700 enseignants et 700 mille impactés, c’est le bilan de l’impact de l’insécurité sur le système éducatif. Et c’est le Président du Faso lui-même qui a présenté ce tableau statistique le 28 juillet 2022.

 

Patrice KAMBOU

Correspondant