A Ouahigouya, les vacances des élèves riment avec labeur
Jeunes à Ouahigouya pratiquant la maçonnerie; Photo: Studio Yafa.

A Ouahigouya, les vacances des élèves riment avec labeur

À Ouahigouya, les vacances ne riment pas seulement avec détente. Beaucoup d’enfants s’engagent dans des activités génératrices de revenus ou des travaux d’apprentissage, pour éviter l’oisiveté ou contribuer aux charges familiales. Mais derrière cette volonté d’occuper utilement leur temps, se cachent aussi des risques.

Dans les rues de la ville de Ouahigouya, une frêle silhouette déambule de cour en cour, une assiette de condiments soigneusement posée sur la tête. C’est Safi, 10 ans, élève en classe de CP2. Elle a préféré laisser de côté les jeux d’enfants pour se consacrer à la vente. Elle propose des aubergines, du soumbala, du piment ou d’autres condiments.

En ligne de mire de cette activité, la période des classes dans quelques mois. « Je me promène avec les condiments parce que je veux de l’argent pour m’acheter des gâteaux à l’école », explique-t-elle avec un sourire timide.

Avec une moyenne scolaire de 8 sur 10, Safi n’a pas de difficulté à suivre ses cours. Mais pour elle, les vacances sont surtout l’occasion de gagner un peu d’argent de poche et de s’occuper utilement.
Un peu plus loin, c’est Adidjatou Nacanabo qui arpente la ville avec ses lots de pagnes colorés. À 14 ans, elle a choisi de consacrer son temps libre à la vente ambulante. « Un pagne à 1 000 F CFA. Deux à 2 000 », lance la vacancière aux passants. L’air dégourdi, elle est en quête d’une liberté financière, malgré son jeune âge. «Si j’en gagne, je n’aurai pas à demander chaque fois à papa ou à maman. Même les enfants ont des problèmes », dit-elle.

Adidjatou nourrit un rêve précis. Acquérir une moto. « Comme l’école est un peu loin de la maison, si j’ai une moto, ça va beaucoup m’aider », poursuit l’adolescente. Pour elle, l’expérience de la vente n’est pas seulement une question de revenu. C’est aussi une manière d’apprendre à se prendre en charge, à se forger une indépendance.

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Dans ans un atelier de mécanique pour deux-roues, les bruits des clés et de marteau se mêlent aux voix des apprentis. Comme dans une fourmilière, chacun est occupé à quelque chose. Parmi eux, Hakim, élève, passe ses vacances à découvrir les bases du métier.

Les mains couvertes de graisse, il raconte avec fierté : « J’ai desserré des écrous, et puis on a enlevé les capots. Maintenant, si on me dit de le faire seul, je peux. Je veux développer un peu mon intelligence, c’est pour ça que je suis venu apprendre la mécanique », précise-t-il, sous le regard amusé de ses camarades.

Pour Hakim, cette immersion est une porte ouverte vers une éventuelle carrière, mais aussi un moyen de s’occuper tout en apprenant quelque chose d’utile. Non loin de là, Firmin Sabo, collégien en préparation du BEPC, a lui aussi choisi d’occuper ses vacances au travail. Loin de ses parents restés au village, il passe ses journées sur un chantier de construction aux côtés d’autres adolescents. « Comme l’école est finie, les villages sont devenus un peu difficiles. Je préfère rester en ville pour travailler un peu. On peut avoir de l’argent pour aider les parents à payer les fournitures scolaires », explique le ‘’manœuvre’’ d’une voix calme.

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Pour Firmin, chaque journée passée à mélanger du ciment ou à porter des briques est un effort consenti pour soulager les charges familiales et préparer la rentrée.
Entre apprentissage et travail précoce À travers ces parcours, une constante se dégage. La volonté des enfants de ne pas rester inactifs. Certains cherchent un revenu, d’autres une expérience formatrice. Mais tous voient dans ces activités une manière de grandir.

Ce choix, cependant, ne fait pas l’unanimité. Si certains parents estiment que le travail forge le caractère et prépare leurs enfants à affronter la vie, d’autres expriment des inquiétudes. Les environnements de travail, souvent inadaptés, peuvent exposer les jeunes à des risques pour leur santé et leur sécurité. Selon Assèta Sama, directrice de la lutte contre le travail des enfants au ministère de la Fonction publique, du travail et de la protection sociale, le travail socialisant n’est pas mauvais en soi.

Par contre, « un enfant qui parcourt la rue peut être exposé à des risques d’accident. Il peut être exposé à des risques de violences physiques, sexuelles». Elle interpelle alors les parents et les tuteurs à éviter d’envoyer les enfants qui peuvent compromettre leur éducation, porter atteinte à leur santé, à leur sécurité, ou bien à leur développement moral.

Studio Yafa