Contrôle des véhicules : accusée de corruption, la police range ses sifflets
la police nationale est accusée de rackets sur les axes routiers

Contrôle des véhicules : accusée de corruption, la police range ses sifflets

Le contrôle des documents de véhicules est suspendu jusqu’au 15 décembre 2020 à Ouagadougou. Ainsi en a décidé la police nationale, suite aux rackets et autres actes de corruption auxquels s’adonnent des policiers. Pour certains jeunes de la capitale, cette décision pourrait créer plus de problèmes qu’elle n’en résout.

Dans une longue file de véhicule au Centre de contrôle des véhicules automobiles (CCVA), Cheick Ouédraogo, 31 ans, maintenancier de profession attend son tour dans son véhicule. Le jeune homme est là pour la visite technique de sa Rav4. Le document qu’il recevra à l’issu de cette visite est un précieux sésame que tout conducteur devrait avoir, pour éviter des ennuis avec le service de contrôle de la police. Mais de l’avis du jeune homme, document conforme ou pas, il y a des abus. « Il y a beaucoup d’arnaques, de pot-de-vin. Que tu sois en règle ou pas, c’est la même chose. J’ai déjà été victime, sur la voie de Kossodo (un quartier de la capitale, Ndlr.) Il y a un rond-point que nous avons même surnommé « la douane ». Même les dimanches, ils (policiers, Ndlr.) sont là et il faut laisser quelque chose avant de continuer », explique-t-il.

La décision de suspendre les contrôles des documents afférant à la circulation est bonne selon lui. Mais elle doit servir à régler les problèmes de corruption, précise-t-il. « Après ça, il faut qu’il y ait un changement. Si tu n’es pas en règle, on t’arrête normalement, il ne faudra pas qu’un billet de 2000 ou de 5000 FCFA te fasse passer alors que tu n’as pas de permis ou que ton véhicule n’est pas en règle », ajoute le jeune conducteur.  Pour sa part, Martin Douamba, 25 ans, étudiant en Master 1 sociologie n’est pas d’accord avec cette décision. Démarcheur devant les guichets de la Direction général des transports terrestres et maritimes (DGTTM), nous lui arrachons quelques mots, alors qu’il hèle en permanence des potentiels clients pour leur proposer ses services. « La vérification des documents pouvait contribuer à lutte contre le terrorisme. Ça peut nous créer beaucoup de problème et favoriser des attaques terroristes. Tout le monde peut aller et venir sans être contrôlé », craint Martin.

Il est clair qu’il faut lutter contre la corruption dans la police, estime le jeune étudiant, mais la solution n’est pas dans la suspension, poursuit-il. « C’était mieux de dire qu’ils vont être plus regardant sur le contrôle des papiers que de dire qu’ils vont carrément arrêter». Pour Emile Pitroipa par contre, « cette mesure n’arrangera personne. Ni les policiers, ni les usagers. Je suis sûr qu’elle fera plus de mal que de bien ». Pour ce citoyen, c’est parce que les policiers contrôlent que les conducteurs payent les assurances et font les visites techniques de leurs véhicules. Mieux il soutient que ce sont les mêmes usagers qui se plaignent des rackets et de la corruption qui sont les véritables corrupteurs. « Quand on arrête les gens, ils passent le temps à négocier et finissent par proposer une certaine somme au policier pour passer. Ce sont ces mêmes personnes qui iront dire aux journalistes que les policiers sont corrompus. Sinon si on te prend et que tu te dis bons citoyens, tu laisses ton véhicule ou ta moto, et tu vas là où on doit payer normalement et tu prends ton reçu », analyse Emile Pitroipa.

Une note de service signée de la direction régionale de la police nationale du centre annonce la suspension des contrôles des documents afférant à la circulation des véhicules, au regard « des actes de racket », dont sont accusés certains policiers.