Art culinaire à la SNC: l’appétit des candidats, la déception des anciens lauréats

Art culinaire à la SNC: l’appétit des candidats, la déception des anciens lauréats

C’est parti pour la compétition en art culinaire à cette 20e édition de la Semaine nationale de la culture depuis ce 1er mai 2023 à Bobo Dioulasso. Ce sont plus de 40 candidats des 13 régions du pays  qui sont en lice dans les différentes catégories. Au-delà de la compétition, certains anciens lauréats regrettent le manque d’accompagnement pour la promotion des mets locaux.

Le parfum des marmites qui mijotent sur le feu. C’est ce qui accueille le visiteur sur l’aire aménagée pour les candidats en art culinaire dans l’enceinte de l’Institut national de formation de personnels de l’éducation(INFPE). Sous des hangars dressés ou sous des manguiers, des femmes essentiellement sont en pleine cuisine.

La marmite de Sylvestre Zoma au feu

Certaines découpent des condiments, d’autres écrasent des épices, pendant que d’autres candidates se tiennent à coté de leurs marmites au feu qu’elles vérifient régulièrement. L’endroit est calme, les candidats sont concentrés. Au même moment, le jury composé de 5 femmes, fiches en main, fait le tour des tables, discutent avec les candidats et notent.

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Sur la table de Sylvestre Zoma, des ustensiles tous en terre cuite. Ce candidat de la région Centre-ouest, est à sa première participation à la SNC. Il compte convaincre le jury avec son plat, « Poulet du Sanguié aux légumes ». « C’est un plat ancestral de chez nous au Sanguié. Nos mamans avaient leur manière de préparer le poulet dans une marmite de terre, c’est ce que je suis venu proposer », dit-il, avec le toque sur lequel est bien visible le drapeau du Burkina.

Une candidate en pleine préparation

Chef cuisinier dans un hôtel à Koudougou, Sylvestre explique que son objectif est de bien représenter la spécificité culinaire de sa localité. « Je veux vraiment le nom élevé  de ma province et celui du Burkina à l’extérieur. Je ne suis pas venu seulement pour la compétition. Il s’agit d’avoir de la visibilité, aussi d’acquérir de l’expérience et aller encore plus loin », dit-il calmement

Après son 2e prix à la précédente édition, Yvette Kaboré candidate du Plateau central est cette fois venue dans l’espoir de remporter le 1er prix. En plat léger, elle est en compétition avec de la salade de persil aux graines de Mung bean (une variété de haricot). En catégorie boisson, elle propose du jus de graines de  kinkéliba torréfié, accompagné de gingembre, tamarin, miel et ananas.

Le manque d’accompagnement

Assise sous un manguier, à l’écart des candidats en pleine occupation, Nacoulma Léa venue de Ziniaré semble se remémorer d’un passé glorieux dans la compétition. De 1988 à 2018, elle a participé à toutes les éditions de la SNC dans la catégorie art culinaire. « Jusqu’en 2014, j’ai toujours eu des premiers prix en boisson, plat lourd et des prix spéciaux. Au cinquantenaire, 2010, j’ai participé avec trois plats qui ont tous reçus des premiers prix. Il fallait que je prépare la relève, j’ai donc inscrit ma petite sœur », dit-elle.

Yvette Kaboré finalise sa salade de persil

En réalité, cette décision de ne plus participer cache une déception qui habite Mme Nacoulma. Son visage devient grave lorsqu’elle parle du manque d’accompagnement et des promesses non tenues à chaque fois qu’elle a été lauréate. « Au moment de la proclamation des résultats, on nous promet des accompagnements pour l’ouverture des restaurants par exemple. Mais une fois la compétition terminée, nous sommes oubliés. Ça n’encourage pas du tout. Voilà pourquoi j’ai décidé d’arrêter, surtout que je suis fatiguée maintenant. Je n’ai pas quelque chose de concret pour montrer ma participation à la SNC », fulmine l’ancienne lauréate. Pour elle, il ne s’agit pas de remporter des premiers prix à chaque édition.

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Un cri de cœur qui semble parvenir au jury art culinaire. La présidente Ouattara Delphine dit comprendre la frustration qui anime certains lauréats. Raison pour laquelle elle rassure que dans les recommandations du jury, l’accompagnement des lauréats occupe une place de choix. « Dans notre procès-verbal, le jury va faire des recommandations. Par exemple dans le jury, il y a une ancienne lauréate qui a ouvert son restaurant. On y a pensé au niveau du jury, on va plaider pour cette cause », précise-t-elle.

La compétition en art culinaire va du lundi 1er au 4 mai 2023. Une quarantaine de candidats sont inscrits pour cette année en dessert, boisson, plat léger et plat lourd. Les candidats ont déjà été lauréats dans leurs régions respectives dont ils défendront les couleurs à cette finale nationale. Selon la présidente du jury, ce sont les plats traditionnels qui sont en compétition, ou du moins, les mets faits à base de produits locaux, de fruits et légumes qu’on peut valoriser. L’originalité du plat sa qualité nutritive et le savoir-faire sont entre autres critères qui seront appréciés.

Tiga Cheick Sawdogo