Chaque 10 octobre, la Journée mondiale de la santé mentale invite à réfléchir sur le quotidien des personnes vivant avec des troubles mentaux. Cette année, notre équipe a plongé au cœur de leur univers en visitant le centre Notre-Dame de l’Espérance à Bobo-Dioulasso. Ce lieu est dédié à leur prise en charge et à leur réinsertion.
Dès l’extérieur du centre, le bruit est perceptible. Rires, cris et gestes enthousiastes emplissent l’air, rappelant l’ambiance d’un vidéoclub en pleine effervescence. Au menu de cette effervescence : un match des Étalons. Un témoignage que le sport peut mobiliser l’énergie et offrir un moment de distraction et de joie, peu importe sa situation. Au premier regard, on croirait être en présence de personnes jouissant pleinement de toutes leurs facultés. Mais ces résidents vivent avec des troubles mentaux. Ils se battent chaque jour pour retrouver équilibre et sérénité.
A l’intérieur, le contraste est saisissant. Certains patients sont allongés sur le dos, semblant abattus par le stress ou la maladie. D’autres, le regard perdu, sont assis sous le hall, le dos contre le mur. Silencieux et détachés du brouhaha environnant, ils portent encore en eux le souvenir d’un passé douloureux, souvent marqué par l’isolement et la stigmatisation.
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Un vieil homme aux cheveux grisonnants, le regard apeuré, nous accueille timidement. Il est résident du centre depuis près de deux ans. « Depuis que je suis arrivé, je peux dire merci à Dieu et au personnel du centre. Vraiment, ça va mieux maintenant », confie le Papy.
À quelques mètres, un autre patient, plus jovial, témoigne d’un parcours différent. Victime d’un accident qui a failli lui coûter la vie, il affirme être désormais guéri. « Je suis maintenant guéri », dit-il avec un large sourire. Sa seule ambition est de regagner son domicile et reprendre son activité de commerce. « Mes parents m’ont rassuré qu’ils viendront me chercher. J’irai continuer mon commerce et, si ça ne marche pas, je pourrai être l’apprenti de mon père, qui est chauffeur. Ça vaut mieux pour moi », explique-t-il, le visage illuminé par la joie.
Son voisin, impatient de rentrer lui aussi, reçoit la visite de son frère, venu constater les progrès réalisés. « Je suis venu chercher mon frère. Son état de santé me satisfait », explique-t-il, avant d’adresser un conseil aux familles confrontées à des cas similaires : « N’hésitez pas à vous tourner vers ce centre. Il offre une vraie solution et redonne espoir aux malades et à leurs proches ».
Un personnel dévoué
Derrière ces sourires se cache un personnel soignant dévoué, travaillant dans l’ombre pour soutenir et accompagner les patients. Créé en 2014, le Centre Notre-Dame de l’Espérance a accueilli et pris en charge plus de 800 personnes. Toutes ont été réinsérées dans la société. A cela s’ajoutent plus de 2 000 patients externes ayant reçu des soins ponctuels, selon le psychologue Issouf Yelemou, coordonnateur des activités du centre.
Pour atteindre ces résultats, le centre met en œuvre une stratégie. Il va jusqu’à organiser des patrouilles pour repérer les personnes vivant avec des troubles mentaux dans les rues ou les quartiers, afin de leur apporter assistance et soins. « Nous veillons à répondre à leurs besoins alimentaires, vestimentaires et médicaux. Notre mission est de redonner dignité et espoir à ces personnes », explique Issouf Yelemou. Le centre joue ainsi un rôle crucial dans la réintégration sociale et la protection des plus vulnérables.
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Pour renforcer cette action, le responsable lance un appel aux bonnes volontés et à l’État. « C’est une association. Nous avons besoin d’un engagement social des bonnes volontés et d’un accompagnement des structures étatiques. C’est un modèle qui mérite d’être soutenu », plaide Issouf Yelemou.
L’édition 2025 de la Journée mondiale de la santé mentale, célébrée le 10 octobre, met l’accent sur le thème : « Accès aux services de santé mentale en cas de catastrophes et d’urgences ». Ce thème souligne la nécessité de protéger les plus vulnérables, surtout dans les contextes de crises, et d’assurer que chacun ait accès aux soins essentiels. Il rappelle également le rôle fondamental des structures locales, comme Notre-Dame de l’Espérance, dans la continuité du soutien aux malades mentaux.
À cette occasion, le centre prévoit des séances de sensibilisation et d’autres activités destinées à rendre hommage aux acteurs du domaine de la santé mentale. L’objectif est de continuer à briser le silence qui entoure ces maladies, de déconstruire les stigmates et de redonner espoir à ceux qui en souffrent.
Mamou Ouedraogo (Correspondante à Bobo)