Diébougou : quand un jeune cordonnier transforme le pagne en chaussures

Diébougou : quand un jeune cordonnier transforme le pagne en chaussures

Au cœur de Diébougou, dans la province de la Bougouriba, un jeune artisan bouscule les codes de la cordonnerie traditionnelle. Sanzun Somé, âgé d’une trentaine d’années, a eu une idée simple et audacieuse. Fabriquer des chaussures à partir de pagne, notamment du célèbre Faso dan fani, symbole du textile burkinabè. Son initiative séduit et redonne un souffle nouveau à l’artisanat local.

Dans son petit atelier du secteur 2 de Diébougou, l’ambiance est rythmée par les bruits d’aiguilles et de marteaux. Sanzun Somé, vêtu de Faso dan fani et le regard concentré, travaille minutieusement une nouvelle paire de sandales. « J’étais élève, j’ai eu mon BEPC, mais l’âge était avancé. J’ai donc décidé de me faire former à la cordonnerie », confie-t-il avec un sourire. Mais le chemin n’a pas été simple. « Quand j’ai commencé, j’ai échoué plusieurs fois. Le jour où j’ai enfin réussi à confectionner une paire, je l’ai portée moi-même. Les gens ont vu et ont apprécié », reconnaît le jeune coordonier.

Cette reconnaissance spontanée a été le déclic. Depuis, Sanzun n’a cessé de perfectionner son art, jusqu’à transformer le pagne, en chaussures modernes et élégantes. L’idée de Sanzun est née d’une observation simple: « Je voyais les gens tisser le pagne. Les morceaux qu’ils n’utilisaient plus, moi j’ai vu que je pouvais les prendre pour en faire un produit consommable ». De là est née une ligne de chaussures originales, colorées et durables. Surtout, entièrement fabriquées à la main. Un savant mélange de tradition, d’écologie et d’innovation.

Une clientèle conquise

Chaque paire est unique. Les motifs du pagne varient selon les disponibilités. Cela confère à chaque création une touche artisanale et authentique. Les prix, eux, restent accessibles selon Sanzun. Entre 4000 et 5000 francs CFA, selon la qualité du tissu utilisé.

Dans la cité de la terre blanche, le bouche-à-oreille fonctionne à merveille. Ses créations séduisent aussi bien les femmes que les hommes. Tous sont attirés par la qualité et l’originalité du produit. « J’apprécie beaucoup ses créations. J’ai déjà acheté plusieurs paires chez lui », confie un client fidèle.

Madame Somé, une habitante de Diébougou, ajoute : « Il est dynamique et accueillant. Les gens viennent de Dissin, de Bobo, de Ouagadougou pour commander. Et il respecte toujours les rendez-vous ».

Ces témoignages illustrent bien la confiance grandissante de la clientèle locale envers les produits “Made in Diébougou”. À travers son atelier, Sanzun Somé contribue à valoriser le textile burkinabè tout en donnant un visage jeune et innovant à l’artisanat.

Un modèle d’inspiration

L’initiative n’est pas passée inaperçue. Pour Dah Bêbê Bio, directeur provincial de la jeunesse et de l’emploi de la Bougouriba, le parcours de Sanzun est exemplaire. « C’est un domaine dans lequel ce jeune est en train d’innover. Il s’inscrit parfaitement dans la dynamique du “consommons burkinabè”. Dans le futur, il pourra former d’autres jeunes, les embaucher et créer de l’emploi. C’est un projet à saluer », explique-t-il.

Il rappelle par ailleurs l’existence de dispositifs d’accompagnement mis en place par le ministère de la Jeunesse. « Il y a notamment le Fonds Faso Kunanwili, qui permet aux jeunes porteurs de projets d’obtenir un appui financier, à condition de remplir les critères. Notre direction provinciale assure aussi le suivi technique et le conseil », précise-t-il.

L’ambition de Sanzun Somé va au-delà de la réussite personnelle. Son rêve ? Avoir des machines modernes, développer sa production et former des jeunes pour pérenniser son savoir-faire. « Si je trouve les moyens, je pourrais recruter des jeunes et les former. Même si je ne suis pas là, ils pourront toujours confectionner », dit-il, plein d’espoir.

A Diébougou, la “cité de la terre blanche”, le jeune cordonnier a déjà tracé son chemin. Celui d’un artisan devenu symbole d’espoir et de créativité pour toute une génération.

Studio Yafa