Cinéma : Quand des jeunes justifient leur absence en salle

Cinéma : Quand des jeunes justifient leur absence en salle

Aller au ciné. Voici une pratique peu habituelle pour des jeunes. Pour certains, pas besoin d’aller au ciné quand on peut télécharger un film pour le visionner dans son téléphone ou dans son salon. Pour d’autres par contre, l’offre cinématographique au Burkina n’est pas attractive.

19h, ciné Neerwaya, Ouagadougou. A l’affiche, « l’homme nouveau » du capverdien Carlos Yuri Ceuninck. Mais, les jeunes cinéphiles ne sont pas au rendez-vous de la projection. « Le cinéma, ça ne me tente pas comme ça, durant l’année j’ai été 2 fois avec ma petite amie. Je peux dire que c’est à cause de la fille que j’y vais. Je suis un homme du show-biz, j’aime là où c’est vraiment animé », nous explique  Boris Siboné, un jeune étudiant que nous rencontrons au parking.

Comme Boris, certains burkinabè n’ont pas la culture du cinéma. Ils n’ont pas pour habitude d’aller en salle pour voir des films. Ils ont d’autres modes de consommation des films, facilitées par les technologies de l’information et de la communication. « Avec le téléphone tu peux de chez toi télécharger et visionner un film de ton choix. Ou bien tu pars dans un coin de téléchargement et tu as le film sur ton portable. Tu te dis à quoi sert encore d’aller au cinéma pour suivre le film que j’ai entre les mains », se défend Henri Bancé, un élève fonctionnaire.

Le jeune homme trouve donc inutile de dépenser 1500 ou 2000 FCFA pour aller voir un film en salle, quand on peut visionner le même film en étant dans son salon.

Les salles s’éloignent des cinéphiles

Les nouvelles modes de consommation des films créent un manque à gagner pour les salles de diffusion. Certaines ont simplement fermé au fil du temps. Selon Rakis Rodrigue Kaboré, président de l’association professionnelle des exploitants des salles de cinés du Burkina, la situation est critique.

Il explique que sur la soixantaine de salle de ciné que connaissait le Burkina sous l’ère de la révolution avec le capitaine Thomas Sankara, seulement deux fonctionnent à plein temps actuellement : Les cinés Neerwaya et Burkina.

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Ces deux salles sont au centre-ville de Ouagadougou. Pour Rakis Rodrigue Kaboré, la ville étant en pleine expansion, les potentiels cinéphiles se retrouvent très loin des espaces de diffusion des films. Cette situation les découragent se déplacer vers les salles de plus en plus loin. « Les salles de cinéma n’ont pas suivi l’évolution démographique », regrette-t-il, tout en ajoutant la cherté de la vie. « Tu ne vas pas emmener ta princesse et ne pas pouvoir lui offrir un Fanta ou un bon poulet donc ça veut dire qu’il vous faut un minimum de 10.000f pour sortir, ce n’est pas évident de nos jours », poursuit-il.

De la pauvreté technique des salles

Ce n’est pas tout. Le président de l’association professionnelle des exploitants des salles de cinés du Burkina pointe du doigt un autre problème qui joue sur la fréquentation des salles. « Aucune des salles burkinabè ne possède le digital Cinema Package (Ndlr. dispositif permettant aux tenanciers des salles d’avoir en temps réel les films étrangers nouvellement sortis). Vous voyez que grâce à cela, le tout nouveau Titanic est déjà programmé dans leur salle », soupire Rodrigue Kaboré.

Etre dans l’air du temps, c’est ce que les salles de ciné Burkinabè devraient peut-être offrir aux cinéphiles. La jeune cinéphile Myriam Tabienga aime bien aller au ciné, mais pas pour suivre n’importe quel film. « A canal olympia, je trouve qu’il y  a des bons films qui passent. Par exemple, j’ai suivi Wakanda dès qu’il est sorti. Je n’aurai pas eu cette chance de suivre ce grand film, pour le moment en tout cas, dans une salle Burkinabè », analyse la jeune fille.

A l’occasion de cette 28e édition du FESPACO, certains films affichent complet. Des jeunes se bousculent pour les voir. Peut-être, appartient-il aux réalisateurs de produire des films en lesquels les jeunes se reconnaissent.

Béninwendé Nikiéma (stagiaire)